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le lyon de nos pères

Bourgelat créerait, en 1761, l’École royale vétérinaire, première école de ce genre fondée en Europe (on voit encore les restes des bâtiments du côté de la rue Vendôme).

La seconde partie du bourg, ou quartier du Pont, commençait à la Rize ou ruisseau de la Mouche, qui allait couper, au midi, le chemin des Trois-Pierres, non loin du fameux logis de la Thibaudière. Au nord, on apercevait, dans son enceinte crénelée, la maison forte ou fief de la Part-Dieu, avec son pigeonnier, sa chapelle, ses écuries et ses granges (le centre était à l’intersection des rues Boileau et de la Part-Dieu), autour desquels s’étendait le beau domaine que Mme de Servient devait plus tard léguer aux Hospices.

Des deux côtés de la Grande-Rue, et jusqu’à la descente du pont du Rhône, il y avait encore plusieurs hôtelleries, dont les plus renommées étaient celle des Trois-Rois (à l’angle de la rue de ce nom, un écusson moderne en rappelle le souvenir), le logis de la Couronne, où, en l’année 1600, Marie de Médicis avait logé avec sa suite, la veille de son entrée solennelle, et celui de Saint-George, où le cardinal Barberini, neveu et légat du pape, reçut les harangues des autorités lyonnaises, le 18 avril 1625. Les pauvres pèlerins, les étrangers mendiants, les voyageurs nécessiteux ou malades, qui s’étaient attardés en chemin et arrivaient après la fermeture des portes de la ville ou étaient arrêtés par une inondation du Rhône, trouvaient un refuge à l’hôpital des Passants (dans la rue de ce nom et près du numéro 37 de la Grande-Rue). C’était un corps de bâtiment meublé de quelques lits et attenant à une humble chapelle. En ces temps de perpétuelles calamités, la charité chrétienne avait établi des hospices aux portes de toutes les villes, à la tête des ponts et le long des routes. On se présentait, à l’hôpital des Passants, muni d’un billet ; un frère recevait les voyageurs ; il leur préparait la couchée, leur donnait du pain et du vin, et leur faisait faire leurs « potages » avec des légumes du jardin ; au départ, on recevait encore un morceau de pain, et quelquefois une légère obole. L’hôpital des Passants était l’Asile de nuit de ce temps-là.

Sur le prolongement du chemin des Passants, s’amorçait, au côté sud de la Grande-Rue, un chemin (plus tard rue de la Vierge) qui rejoignait celui de Béchevelin. Ce dernier, partant de la descente du pont, longeait à l’est le pré des Danses ou des Repenties et se dirigeait au midi, vers les ruines du château et de l’église de Béchevelin. Au bord de la lône (qui couvrait du nord-ouest au sud-ouest les bâtiments actuels de l’Université), on apercevait encore, sur son monticule artificiel (en un point correspondant à l’intersection des rues de Marseille et de la Vitriolerie, juste en face de la rue Sainte Hélène), les vestiges de l’antique donjon de Béchevelin, et de sa double enceinte de murailles, que l’archevêque Jean de Bellesmains avait construits au xiie siècle pour défendre l’entrée de la ville et arrêter les incursions des Dauphins de Viennois ; un peu en arrière (rue de Marseille, entre les rues du Prado et du Rhône), se trouvaient les restes de l’ancienne église de Notre-Dame de Béchevelin, qui, bien que ruinée en 1562 par les calvinistes, demeurait, après son abandon, l’objet de la dévotion populaire ; et l’on sait que, même après l’entière destruction de l’église, le culte de Notre-Dame de Béchevelin devait se conserver d’une manière touchante dans un pauvre oratoire en planches élevé devant une image de la Vierge (à l’angle des rues de la Vierge et de Béchevelin), que la piété des fidèles ne cesserait d’orner d’ex-votos, jusqu’à ce que, à son tour, ce fragile édicule fût détruit par un obus pendant l’insurrection de 1834.

Aux approches du pont (qui commençait sur la place actuelle de ce nom), ce n’étaient plus que