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le lyon de nos pères

l’antique église de Saint-Alban devenue simple chapelle (et qui existe encore non loin de la route, dans l’hospice des Incurables). Un peu plus au nord, étaient les pentes boisées de Montchat, où, en 1656, la maison de campagne de l’ex-consul François Basset abriterait la reine Christine de Suède.

De l’extrémité du plateau, les regards embrassaient l’immense plaine verdoyante,sillonnée de ruisseaux et de lônes, semée de bouquets de saules et de peupliers, incrustée de petits lacs vers les bois de la Tête-d’Or ; parmi les prés et les pacquerages, s’étalaient les édifices et les maisons du « beau et grand bourg de la Guillotière », séparé de Lyon par le large Rhône et ses iles couvertes d’épais broteaux ; à l’ouest, fermant l’horizon, se dessinait, par delà les coteaux de Fourvière et de Sainte-Foy, la courbe bleuâtre des monts du Lyonnais, depuis le Pilat jusqu’au Mont-d’Or. Maintenant, on descendait en ligne droite. Au nord, derrière la maison forte des Tournelles, autour de laquelle devait se former plus tard Monplaisir, on apercevait la Ferrandière et Saint-Antoine, entre le chemin de Crémieu et celui de Villeurbanne ; au midi, entre le chemin d’Heyrieu et celui de Vénissieux, les domaines de Grange-Rouge, près des anciens fossés des Sarrazins, de Grange-Blanche, de Combe-Blanche (où est le cimetière actuel de la Guillotière) ; et plus loin, sur la route de Vienne, le vaste château de Champagneux, édifice du XVe siècle, qui deviendra, au XIXe, l’hospice de Saint-Jean-de-Dieu. — Placé comme en vedette aux portes du faubourg, le château de la Mothe, entouré de fossés, dressait fièrement son donjon et ses tours, témoins des brillantes réceptions qui avaient précédé les entrées solennelles du cardinal-légat du pape Paul IV, de la reine Marie de Médicis venant s’unir à son royal époux, de Louis XIII et d’Anne d’Autriche. Mais son heure de gloireétait passée ; aucune reine ne viendrait plus ouïr la messe dans sa chapelle, consacrée aux oraisons des religieuses de Sainte-Elisabeth ; ses échos ne répéteraient plus les sons des fanfares accompagnant les cortèges royaux ; il n'y retentirait plus, à l’avenir, que les cris des élèves du collège de la Trinité jouant dans les préaux les jours de congé et, deux siècles plus tard, les sonneries de clairon, lorsque, à la suite de transformations diverses, le vieil édifice de la Renaissance serait enclavé dans l’enceinte d’un fort. Derrière le château de la Mothe, au bord du chemin de Vienne, contiguës à la chapelle de la Madeleine, succursale de Saint-Michel d’Ainay, et à celle de l’ancienne maladrerie de Saint-Lazare (angle des rues actuelles de la Madeleine et du Repos), s’étendaient les prairies où Bayard avait fait ses premières armes, le 20 juillet 1494, au tournoi donné par le sire de Vaudrey en présence du roi Charles VII, et où les habitants de Lyon viendraient en pèlerinage, chaque année, le 2 novembre, lorsque, à partir de 1606, les hôpitaux enterreraient leurs morts dans ce premier cimetière extra murs, dit de la Madeleine.

Les voyageurs s’étaient engagés dans la partie du faubourg appelée le Seron et arrivaient à