Page:Le Lyon de nos pères - Emmanuel Vingtrinier.pdf/290

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
234
le lyon de nos pères

du jour, qui est accompagnée d’un jardin en terrasse. Quant a la ruelle de Tire-Cul, si bien nommée, — continue notre homme en nous faisant verser à boire — on l’appelait anciennement chemin de Fonturbane, ensuite du Ruer, c’est-à-dire du ruisseau, et il y avait, au-dessus, une porte qui fermait la ville de ce côté et qu’on nommait la porte du Ruer. Il paraît qu’il existait des degrés pour faciliter la montée ; il n’en reste plus trace ; mais un de messieurs nos échevins, M. Ph. Gueston, se propose d’en faire bâtir en pierre de taille, à ses frais, tout le long du côté nord, depuis la rue du Bœuf jusqu’au sommet de Tire-Cul. Tous ces terrains situés au nord appartiennent, depuis le bas jusqu’en haut, à la famille de l’illustre Balthazard de Villars, seigneur de Laval et du Roquet, président et lieutenant général en la Sénéchaussée et Présidial, premier président au Parlement de Dombes, et trois fois prévôt des marchands, qui était le beau-père de M. Pierre de Sève, seigneur de Fléchères, dont vous avez remarqué le bel hôtel à côté du Palais de Roanne. Vous verrez, plus haut, les tourelles de la maison paternelle des Villars ; elle porte le nom de Beaulieu. Le chancelier Pompone de Bellièvre y vint loger en 1600. C’était là-haut, tout au bout d'une galerie, que le président avait installé son cabinet de médailles. Au-dessous de la maison de Beaulieu, des jardins et des terrasses communiquent, le long du coteau, jusqu'aux habitations de la rue du Bœuf ; car le tènement est considérable ; plusieurs maisons de la rue du Bœuf appartiennent aux héritiers de Villars. La veuve du président Balthazard, dame Louise de Langes, qui lui avait donné seize enfants, dont treize furent, hélas ! enlevés « en leur plus tendre fleur », y habitait, quand elle est morte ; elle possédait aussi, au coin de Tire-Cul, la maison appelée « de la Chaîne », parce que la chaîne qui fermait autrefois le passage était fixée au mur de cette maison. » — Maître Bérodat ne tarit point ; il connaît sur le bout du doigt histoire de son quartier. L’écuyer nous verse une seconde rasade d’un petit vin de Millery et notre hôte reprend : — « Presque toutes les maisons de la rue du Bœuf, du côté de la montagne, ont des écuries sur le derrière. Elles ont toutes des terrasses et des jardins. Jadis, il y avait là un certain nombre de jeux de paume, appartenant à des seigneurs, qui les louaient aux paumiers ; il en reste encore deux ou trois, mais qui ne sont plus aussi fréquentés…. La aussi, du côté du couchant, se trouvait, dès la fin du xve siècle, l'hôtel de la Monnoye ; c’est de cet atelier que sont sorties les deux premières médailles portant l'effigie de nos rois : l’une en 1491, à l’occasion du mariage de Charles VIII avec Anne de Bretagne, l'autre, en 1499, en l’honneur de Louis XII. L'hôtel de la Monnoye passa dans les mains d’Antoine de Roncheval, seigneur de Pramenoux, puis dans celles de Pierre Orlandini, marchand florentin, qui avait acheté des héritiers de Jean Caille, derrière cet hôtel, un grand jardin donnant sur la rue Saint-Barthélemy ; dans la seconde moitié duxvie siècle, la maison de la Monnoye appartenait par indivis au conseiller Guillien, auditeur de camp, et à Guillien de Sala. — C'est vers cette époque, en 1586, que le médecin Louis Thorel possédait, au coin de l’ancienne ruelle Chalan ou Chollet, — aujourd'hui place Neuve — la maison ayant pour enseigne le joli bœuf en pierre, qui a donné son nom à cette partie de l’ancienne rue Tramassac. Depuis lors, la démolition d’une grande maison appelée de Chaponay, dans laquelle avait habité l’archevêque Pierre de Savoie, a fait succéder la place Neuve à l’ancienne ruelle, qui était la seule voie de communication de la rue du Bœuf à la rue Saint-Jean. — Vous verrez, Messieurs, la curieuse figure grotesque et les chevrons ouvragés qui soutiennent la toiture de la maison du Bœuf. Plus loin, visitez, en passant, la cour de la maison