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le lyon de nos pères

Turquet et Nariz. Là aussi, est l’entrée de la Grande-Boucherie, construite sur

l’emplacement des anciens fossés de la Lanterne, entre la rue de la Boucherie, au nord, et la ruelle du Bessard, au midi (tronçon occidental de la rue Constantine). C’est une boucherie fermée, composée de deux corps de bâtiments parallèles, avec un passage au milieu et, de chaque côté, une rangée d’étaux et de boutiques ; on y fait les tueries et la vente au détail. Ce n'est plus la première boucherie de la Lanterne bâtie il y a cent ans : celle-ci fut, en 1614, complètement dévorée par un incendie. Les bouchers l’ont fait reconstruire à leurs frais, telle que nous la voyons encore, avec des boutiques en bois ; la ville, qui en est propriétaire, met en adjudication, tous les trois ans, la ferme de ces boutiques. Il n’y a pas, à Lyon, d’endroit plus grouillant, plus malpropre et même plus dangereux, que la Grande-Boucherie des Terreaux et ses abords. Aux jours de marché, aux veilles de fêtes, bourgeoises et femmes du peuple, hôteliers, pâtissiers, des quartiers des Cordeliers et de la Grenette, de Saint-Nizier et des Terreaux, viennent en foule s’approvisionner de viande. Les jours précédents, c’est l’arrivée des bestiaux, qu’on amène en troupeaux, et qui parfois, s’échappant furieux, vont jeter la terreur dans les ruelles avoisinantes ; ce sont les vociférations sauvages des bouchers, les aboiements féroces de leurs dogues. En tout temps, des ruisseaux de sang, des mares stagnantes de débris corrompus et d’immondices répandent aux alentours une effroyable puanteur. De la ruelle du Bessard, au midi, tortueux boyau de neuf pieds de largeur, passage mal famé, jadis adossé à la paroi intérieure de la muraille d’enceinte, se dégagent des odeurs de triperie qui achèvent d’infecter l’air. — Derrière la Boucherie et sur son prolongement du côté de la Saône, la Poissonnerie, construite en 1618, d’après les plans de Zanobis de Quibly, regarde la place et le port de la Feuillée, d’où l’on aperçoit, en amont, l’église et le couvent des Grands-Augustins et, un peu plus haut, le pont de bois de Saint-Vincent, couvert de petites boutiques.