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Au Lecteur



CE livre est pour ceux qui se plaisent à « la chanson du passé que
disent nos vieilles rues », et qui, en errant par la ville moderne, aiment à se donner le divertissement de la cité d’autrefois.

Avec la marque si personnelle qu’il savait imprimer à sa pensée, Nizier du Puitspelu se demandait un jour quel ne serait pas l’étonnement de nos ancêtres du XVIIesiècle, s’ils pouvaient revenir parmi nous, de voir leur maison de la place Bellecour éclairée au gaz, mille usines pour la fabrication de produits inconnus à la place des « pacquérages et des broteaux » de la rive gauche du Rhône, et la gare de Perrache à l’endroit des vourgines de l’ile Mogniat.

Notre surprise serait-elle moins grande, si nous étions tout à coup transportés à deux ou trois cents ans en arrière et qu’il nous fût permis de contempler le Lyon du temps de Louis XIII et de Louis XIV ?

C’est précisément ce spectacle infiniment curieux que l’on a tenté de présenter ici, sous le titre de Lyon de nos Pères.

Le lecteur assiste à une promenade dans Lyon, en l’année 1643, à la suite de voyageurs étrangers, arrivant d’Italie par la plaine dauphinoise et le faubourg de la Guillotière, et ressortant de la ville par la porte de la Croix-Rousse, après l’avoir parcourue en tous sens et visiter dans tous ses détails. On s’est efforcé de rétablir les noms des anciennes rues, de les montrer sous l’aspect qu’elles offraient en ce temps-là, de dépeindre les monuments publics et les principales habitations privées dans l’état où ils se trouvaient alors, enfin, d’en retracer rapidement l’histoire et les modifications successives, comme le ferait aujourd’hui un bon cicerone pour la ville contemporaine.

Ce n’est pas sans d’excellentes raisons que l’on a choisi, de préférence à toute autre, l’époque de la fin du règne de Louis XIII. En 1643, Lyon n’a encore dépouillé qu’en partie la physionomie si pittoresque de la ville du moyen âge ; toutefois, celle-ci est en pleine transformation. Elle se bâtit à Bellecour et à Ainay, s’étend sur le coteau de Saint-Sébastien ; l’Hôtel-Dieu et la Charité, les deux collèges des Jésuites, de nombreux monastères, viennent d’être construits ; bientôt l’Hôtel de Ville s’élèvera sur les anciens fossés des Terreaux.

La Renaissance avait profondément modifié l’architecture privée ; sous Louis XIII, une architecture monumentale, dépourvue de charme et d’élégance, mais robuste et non sans noblesse, venait de prendre un vigoureux essor.

Cette période de transformation est une des plus intéressantes de l’histoire de Lyon. C’est, d’ailleurs, l’époque sur laquelle on manquait le moins de documents. Les belles estampes d’Israël Silvestre et de Merian, les admirables plans de Simon Maupin, complétés au XIIIe siècle par les planches de Lallemand et les dessins de J.-J. de Boissieu, au XIXe par ceux de Leymarie, Gabillot, Fonville, Tournier, Saint Olice, étaient, au point de vue iconographique, des guides extrêmement précieux.