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le lyon de nos pères

Mais, parmi ces tombes de marchands et d’artisans, combien de noms illustres sont gravés sur les dalles de l’église et des chapelles ! Voilà l’épitaphe du libraire florentin Jacques de Juncte, inhumé par les soins de ses filles, Jeanne et Jacqueline, dont les figures apparaissent de profil au-dessous de l’inscription ; plus loin, ce sont les Gondi et les Strozzi ; les Capponi, qui, dès 1492, firent à

leurs frais, dans cette église, un chœur et un autel ; nobles David et Louis-Claude de Cléberg, baron de Saint-Trivier ; Antoine du Verdier, les Chaponay, les d’Anthon, les Varey, les Mitte de Chevrières. Les La Poype ont des tombeaux dans la chapelle de Saint-Hyacinthe et dans celle de Sainte-Barbe, Cette singulière épitaphe latine, toute en macabres jeux de mots, que nous rencontrons devant la chapelle de Saint-Pierre, est celle des Mory. Là, c’est le tombeau du célèbre médecin Jacques Daleschamps, qui se promet l’immortalité dans la prosopopée en quatre vers phaleuces joints à son épitaphe. — Le chœur où chantent les religieux est séparé de la nef et des bas-côtés par une clôture de petites colonnes en différents marbres : à l’entrée, s’élèvent deux grandes colonnes de marbre blanc veiné, supportant un attique dans lequel sont les armes d’Alexandre Orlandini — le riche préteur de Henri IV — qui fit à ses frais cette décoration, peu en harmonie avec le style de l’édifice, ainsi que les ornements du grand autel et les stalles, également en marbre. Le tableau du maitre-autel, peint par Le Juste, peintre du grand-duc de Florence, représente saint Jean baptisant Jésus : l’église est, en effet, dédiée à la fois à saint Jean-Baptiste, patron de Florence, et à saint Dominique, patron des Frères-Prêcheurs. — Dans ce chœur est inhumé le savant dominicain Sante Pagnini, dont la voix, dit-on, retentissait comme une trompette quand il prêchait contre les réformés, celui qui avait suggéré à Gadagne la fondation de l’hôpital Sant-Thomas, et dont les funérailles furent un si grand deuil public qu’on vit plus de trois cents lambeaux derrière son cercueil. Au fond, sous une arcade, on lit l’épitaphe de Jacques de Bourbon, comte de la Marche, et de son fils, morts des blessures qu’ils avaient reçues à La bataille de Brignais, livrée en 1362 contre les Tard-Venus.

Protégée et décorée avec prédilection par les Florentins, qui avaient acheté des orgues et entretenaient le maître de chapelle, l’église des Jacobins était une des plus riches de la ville, quand elle eut à subir, comme la plupart des autres, les ravages des calvinistes et que, du sanctuaire mutilé, le baron des Adrets fit une écurie pour ses chevaux. Mais ce ne fut qu’un accident douloureux dans l’histoire de ce célèbre monastère, où le pape Jean XXII fut élevé au souverain pontificat, où le dernier Dauphin, Humbert de la Tour, prit l’habit de Saint-Dominique, après y avoir donné l’investiture du Dauphiné à Charles de France, duc de Normandie, fils du roi Jean ; où séjourna Charles VIII ; où le cardinal d’Amboise donna le bonnet de cardinal à René de Brie,