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le lyon de nos pères

l’après-midi, le poète Clément Marot, Etienne Dolet, Symphorien Champier, le bibliophile Jean Grollier ; et les langues, spirituelles ou savantes, faisaient entendre ces « paroles dégelées » que les Sébastien Gryphe, les Claude Nourry, les Jacques Moderne, lancent aux quatre vents de la renommée. À deux pas de

ce carrefour, dans la rue du Raisin, Jean de Tournes avait son atelier à l’enseigne Aux Deux Virères, que l’on voit encore sur la belle maison reconstruite par les Julliéron, ses successeurs, et il y imprimait les œuvres de Clément Marot et de Louise Labé. Celle-ci, la célèbre « Belle Cordière », demeurait non loin de là, dans la jolie maison de son mari, le maître cordier Ennemond Perrin, à l’angle sud-est de la rue de Notre-Dame de Confort, et de celle qui déjà portait son nom (rue Belle-Cordière, aujourd’hui rue de la République). Nous apercevons d’ici la façade, du côté de l’Hôtel-Dieu ; le principal corps de logis a deux étages, et chacun d’eux, trois fenêtres, Au rez-de-chaussée, deux arcs de boutique : là se trouvait l’ouvroir du cordier. Profession lucrative, que celle d’Ennemond Perrin : il fournissait, chaque année, à la batellerie, des lieues de cordages à hisser les voiles, et de ces gros câbles à remorquer les équipages et à amarrer les moulins, comme ceux dont les serviteurs de Pantagruel se servaient pour le lier dans son berceau. Derrière la maison, s’étend, au midi, le jardin que le poète Olivier de Magny a chanté, cet asile préféré des Muses, que la dame de céans avait semé de fleurettes au suave parfum, orné « de maints arceaux couverts de coudriers, et d’un bocage faict de cent arbres divers ».