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le lyon de nos pères

robe blanche, scapulaire et chaperon noir, nous attend le savant historiographe du monastère, le P. Benoit Gonon, auteur de Histoire et Miracles de Notre-Dame de Bonnes-Nouvelles ; guidés par lui, nous gagnons, au nord, une porte latérale de l’église ; celle-ci, dont la façade regarde la Saône, est un édifice gothique, d’assez médiocre architecture, élevé, en 1450, par Louis Ier, second duc de Savoie, qui avait hérité des sentiments de son père, Amédée le Pacifique, pour les Célestins de Lyon ; ce prince vint mourir à Saint-Jean, le 29 janvier 1465, dans la maison de Sibylle Cadière, veuve d’un riche négociant, et son cœur fut inhumé dans le mausolée en marbre blanc que nous voyons à droite de l’entrée du sanctuaire ; l’épitaphe et les armoiries ont été enlevées par ordre de Henri IV : irrité contre le due de Savoie, le roi voulut effacer ces insignes, qui rappelaient, dans son propre royaume, les ennemis de sa maison. En face de ce monument, le P. Benoit Gonon nous montre, à l’entrée des chapelles situées au nord de la nef, une table de marbre, où nous lisons : Icy est le cueur de très illustre George d’Amboise, Léqat perpétuel en France et en Avignon, Archevesque de Rouen, insigne bienfaicteur de ce monastère, où il décéda le XXV may M. D. X. Le grand ministre de Louis XII logeait au couvent des Célestins chaque fois qu’il séjournait à Lyon ; il était revenu, accompagnant le roi, au printemps de l’année 1510, quand il tomba gravement malade au monastère et y succomba ; Louis XII le pleura et lui fit de superbes funérailles. Le buste du cardinal d’Amboise, placé jadis au-dessus de l’inscription que nous venons de lire, fut détruit par les protestants. — Quand les soldats du baron des Adrets pénétrèrent dans la ville, ce fut le couvent des Célestins qui eut le triste privilège d’être, le premier, envahi et mis à sac ; ils s’y retranchèrent comme dans une citadelle, y placèrent leurs canons, et ce fut d’ici qu’ils foudroyèrent les murailles du cloitre de Saint-Jean ; le trésor, tous les objets d’or et d’argent furent enlevés, et le mobilier des religieux vendu à l’encan devant leur porte. Les magnifiques vitraux de l’église, représentant les grandes scènes de la Passion, la Magdeleine au Jardin, l'Arbre de Jessé, offerts par le duc Louis, le roi Louis XI, Charles VIII et Anne de Bretagne, Philippe de Savoie et Marguerite de Bourbon, Louis d’Amboise évêque d’Albi, subirent eux-mêmes les outrages des envahisseurs.

Cependant, les désastres réparés, l’église des Célestins s’est enrichie de nouvelles œuvres d’art. Le retable du grand autel renferme une admirable Descente de Croix, de François Stella, qui s’y est peint lui-même. Parmi les autres tableaux du chœur, nous admirons la Procession de saint Grégoire, un des meilleurs ouvrages d’Horace Le Blanc, qui a fait aussi les tableaux de la Vierge et de l’autel privilégié, ainsi qu’une Descente du Saint-Esprit. Plus tard, ce seront encore deux figures à mi-corps, de l’habile coloriste flamand Squoniam, représentant, l’une la Femme adultère, l'autre, le Reniement de saint Pierre, et quatre beaux paysages de Verdier. La sacristie est elle-même toute tapissée de peintures et d’ex-voto. — Sur les dalles de la nef, parmi les noms des personnages qui y sont inhumés, on lit ceux du fameux libraire Guillaume Rouville et de l’imprimeur Jean Pillehotte. Dans une des chapelles situées au côté nord du chœur sont inhumés François Guerrier, seigneur de Combelande et de Jons, noble Jean-Baptiste de Sarda, trésorier de France, Claude de Tourvéon, lieutenant-général du Gouvernement de Lyon, et M. de Tourvéon, grand obéancier de Saint-Just, lequel eut, en 1595, l’honneur de haranguer Henri IV au nom du clergé de Lyon. À côté, se trouve la chapelle de Saint-Pierre-de-Luxem-