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le lyon de nos pères

— Il nous reste à visiter l’église, dont l’entrée fait face à la maison Lumagne. Elle n’a pas encore de clocher, mais un fort élégant portail, que son successeur fera regretter. De simples montants entre de doubles arcades séparent la nef des ailes de l’édifice, les arcades supérieures formant de grandes tribunes où les pauvres viennent assister aux offices. Derrière le maître-autel, au milieu d’un énorme retable en bois, est encadré un des meilleurs tableaux d’Horace Le Blanc : La Vierge tenant l’Enfant Jésus, dans une gloire, et plusieurs saints au-dessous ; du même peintre, sont représentés : le Mystère de la Sainte-Trinité, dans le tableau de l’attique ; les Vertus théologales, dans la chapelle du côté de l’épitre ; et quatre petites toiles, dans le sanctuaire. Déjà sont érigés, autour de la nef, des inscriptions, des mausolées rappelant la mémoire des principaux bienfaiteurs. C’est dans la chapelle de la Vierge, à gauche du grand autel, que sera inhumé le cardinal archevêque de Richelieu. Né pauvre, voué à la pauvreté — comme le dira l’épitaphe latine composée par lui-même —, il mourra pauvre et voudra reposer parmi les pauvres, après avoir comblé leur maison de ses bienfaits. Quelques années plus tard, Nicolas Bidau fera le buste et Jacques Mimerel le cénotaphe en marbre noir de ce Jacques Moyron, baron de Saint-Trivier, fils d’un pauvre fripier, qui est devenu un grand magistrat et qui laissera à l’Aumône la plus grosse part de l’immense fortune des Cléberg. Enfin, au xviiiesiècle, des mausolées exécutés par les Perrache conserveront le souvenir de Panissot, trésorier de France, et de Jean Pierre Giraud et Mathieu Chabert, qui auront institué pour héritiers les pauvres de cet hospice.

Au chevet de l’église, les cours de la Charité ne sont encore séparées que par un simple mur de la double rangée de tilleuls où se trouve l’extrémité du jeu de mail (place de la Charité}. Des jardins clos et des maisons basses forment toute issue du côté du Rhône. Il s’écoulera encore une soixantaine d’années avant que la percée ne soit faite jusqu’au bastion Villeroy, en avant de la Charité, sur le rempart du Rhône. Un peu plus loin, nous retrouvons la ruelle des Basses-Brayes, communiquant de la place Bellecour au rempart (4, quai de la Charité}, puis les pittoresques masures qui obstruent, au midi, les abords de la porte du Rhône, la chapelle du Saint-Esprit, et les courtines fortifiées à la moderne — comme la presqu’ile d’Ainay — jusqu’aux Cordeliers. On montre, près de la chapelle du Saint-Esprit, une ouverture pratiquée dans la muraille pour descendre au fleuve, et par laquelle, dit-on, les corps des protestants massacrés en 1572 auraient