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croit atteints d’une maladie contagieuse. Enfin, depuis peu de temps, on a bâti, à proximité des deux moulins appartenant à l’Aumône générale, ces superbes greniers à blé, « des plus beaux de la France », qui développent, du côté du Rhône, une façade percée de quinze fenêtres de front (environ 40 mètres de long), et auxquels on arrive, de l’intérieur du claustral, par un perron à quatre rampes. Dans cet immense asile, les recteurs de Notre-Dame de la Charité ont pu, à côté des pauvres, recueillir successivement, en 1629, les orphelines légitimes de la ville, élevées auparavant à l’hôpital de Sainte-Catherine, et en 1639, les orphelins légitimes, précédemment enfermés à celui de la Chana, — qui deviennent les uns et les autres les enfants adoptifs de l’Aumône ; puis, les

enfants trouvés, les petits bâtards, et les Thérèses ou orphelines illégitimes. — A la procession des pauvres, le troisième dimanche de la foire de Pâques, tous ces enfants marchent deux à deux, dans l’interminable file, — qui part de la grande cour de la Charité et traverse toute la ville pour se rendre à la Cathédrale, — suivie des recteurs de l’Aumône et de l'Hôtel-Dieu avec leurs officiers, des ordres mendiants, de l’archevêque, du gouverneur, des magistrats et des échevins ; c’est un émouvant spectacle que cet étrange défilé, précédé des crieurs des confréries sonnant leurs clochettes et d’un vieux pauvre en longue chemise blanche, tête et pieds nus, portant un crucifix. Chaque catégorie d’hospitalisés se reconnait à son costume distinct : les enfants adoptifs de la Chana sont en bonnet gris, casaque et chemisette bleues ; les Catherines, tout en bleu avec la chemisette blanche à liséré rouge, et la tête couverte d’un voile blanc ; les grandes filles de la Charité, l’une d’elles portant la croix, en robe de drap vigan ; les petites, en couleur sombre de racine ; les femmes, en laine couleur minime, toutes également voilées ; les hommes, le bonnet gris à la main, en casaque de vigan tannay, haut et bas de chausse de toile.