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le lyon de nos pères

fête du saint, sur l’autel qui lui est dédié et dont Thomas Blanchet peindra le tableau. — À la suite de l’église s’étend le cloître, dont les murs et les arcs sont couverts d’inscriptions en français tirées des psaumes. Ce monastère, qui jouit d’une grande réputation, est habité par une cinquantaine de religieuses. Mme de Sévigné passera chez elles la journée du 10 octobre 1673 ; en souvenir de sa grand’mère, Mme de Chantal, fondatrice de la Visitation, la spirituelle marquise ne manquera jamais d’aller voir les Visitandines, quand elle traversera une ville possédant un couvent de cet ordre.

En face du monastère de Sainte-Marie de Bellecour, André Athiaud de Boissat fera ouvrir, en 1645, à travers les jardins de son domaine patrimonial, la rue qui portera simultanément les noms de Boissat et de Sainte-Marie ; puis, il aliénera les terrains situés de chaque côté, et bientôt s’y élèveront de beaux hôtels. À l’angle nord-ouest de la nouvelle rue, près des Tilleuls, Barthélemy Loubat-Carlier, trésorier de France, bâtira celui (2 et 4, rue Boissat, et 27, place Bellecour), qui passera plus tard aux Ponsaimpierre, puis aux Regnault de Parcieu, et dont l’architecte P.-J, Thénadey fera, dans la seconde moitié du xviiie siècle, la façade à attique et à balcons en fer forgé. A la suite, sur des terrains vendus à Nicolas Baraillon, seigneur de la Combe, à Laurent de la Veuhe, seigneur de Curys, trésorier de France, et à Claude Chana, entrepreneur de bâtiments, ce dernier construira deux maisons : l’une (n° 6), que Daniel Sarrabat décorera plus tard de très belles peintures mythologiques en camaïeu, appartiendra à Claret de Fleurieu, qui y recevra Voltaire, puis à son fils, Claret de la Tourrette, qui y donnera plusieurs fois l’hospitalité à Jean-Jacques Rousseau ; l’autre (n° 8) deviendra la propriété des Charrier de la Roche, puis celle des Monspey (les n°6 et 8 réunis sont aujourd’hui le pensionnat des Dames du Sacré-Cœur). — En face, Marguerite Michel, veuve de François Chapuys, fera bâtir des maisons à l’angle nord-est (n° 1, 3 et 5), et à côté (n° 7), son fils, conseiller du roi en la sénéchaussée et siège présidial de Lyon, entreprendra, en 1648, la construction d’un jeu de paume, avec un grand balcon donnant sur la rue Boissat, un perron en saillie et, pour enseigne, une sphère, rappelant la dénomination (sphæristerium) par laquelle les Romains désignaient le local où ils pratiquaient ce même jeu. C’est sans doute, nous avons dit, dans cette salle, située à proximité de la Maison Rouge, où il logera, que le jeune Louis XIV viendra s’exercer, durant son séjour à Lyon en 1658. L’enseigne de la Sphère donnera son nom à la rue Laurencin, ouverte par la veuve de Jean du Peyrat (rue François-Dauphin), et qui, partant du rempart du Rhône, vient se terminer en cul-de-sac au nord de l’emplacement du futur jeu de paume (Démoli en 1843 pour l’ouverture de la rue Bourbon).

André de Boissat, — qui s’est endetté aux armées, — après avoir vendu à Pierre Perrachon de Saint-Maurice la plus grande partie de ses immeubles, se réservera néanmoins, au sud-est de la rue qu’il aura créée (nos 9 et 11, rue Boissac) et le long de la rue Sala (jusqu’au n° 31 inclus) un espace de terrain sur lequel il se fera bâtir, en 1650, une habitation personnelle, dont la façade orientale s’ouvrira sur un jardin (c’est l’hôtel du Quartier général). Mais ce gentilhomme, inhabile aux spéculations, sera bien vite aux prises avec de nouveaux embarras financiers, qui l’obligeront à abandonner ce dernier reste de son bel héritage. L’acquéreur du petit hôtel, noble Pierre-Joseph Giono, seigneur de la Haye, conseiller du roi, s’y installera au mois de décembre 1655 ; il y ajoutera une aile au nord, et fera élever, à la suite, des dépendances considérables, écuries, remises, fenières (n° 9, rue Boissat, 10 à 12 rue Victor-Hugo, et au delà, du côté