Page:Le Lyon de nos pères - Emmanuel Vingtrinier.pdf/158

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
118
le lyon de nos pères

rapport avec l’accroissement des armées et le rôle plus considérable du canon dans les batailles et les sièges, le roi avait choisi ce nouvel emplacement, beaucoup plus spacieux que le premier, et non moins commode, grâce au voisinage de la Saône, pour l’embarquement des munitions. Le mur d’enceinte, élevé au commencement du règne de Louis XIII, est muni d’échauguettes aux quatre angles et protégé au nord par une tour carrée surmontée de hourds en pierres ; il forme un immense quadrilatère limité au sud par l’église Saint-Michel, à l’est par la rue de l’Arsenal (rue du Plat actuelle}, à l’ouest par la rivière, qui vient battre la muraille, et au nord par une tortueuse ruelle qui, derrière les écuries de la Maison Rouge, fait suite à la rue du Peyrat jusqu’à la Saône. On entre à l’Arsenal par un grand portail, s’ouvrant sur la rue de ce nom, et par plusieurs autres portes. Un jardin en occupe la plus grande partie. Du côté méridional, subsiste encore, englobé dans l’enceinte, un des bâtiments de l’ancien monastère de Saint-Michel, où l’on voit, sur les murs d’une salle remplie d’engins de guerre, des peintures à fresque, décolorées par le temps, qui représentent d’idéales figures de religieuses drapées dans leurs longues robes et levant vers le ciel des regards pleins d’extase. Au fond du jardin, et en face du portail, un vaste bâtiment supporté par des piliers, en forme de halle ouverte, s’allonge parallèlement à la rivière : c’est là que sont rangés les canons posés sur leurs affûts. Au nord et au sud de ce hangar, d’autres constructions renferment le reste du matériel de guerre, la poudrière et une raffinerie de salpêtre. Cette poudrière, placée en pleine ville, constitue pour le quartier de Bellecour un danger permanent, qui deviendra plus redoutable à mesure que les habitations y seront plus nombreuses : c’est en raison de ce danger que, dans la suite, une partie des poudres sera transportée à la Croix-Rousse et que, au commencement du xviiie siècle, une poudrière sera créée à Serin. — Fort négligé après les guerres de Louis XIV, et tombant en ruines, l’Arsenal sera reconstruit, de 1782 à 1787, sous la direction du chevalier de Barberin, officier d’artillerie, sur le même emplacement, agrandi au midi. Quatre grands corps de bâtiments couverts en ardoises, avec des combles à pignons très élevés, serviront au dépôt des armes : aux rez-de-chaussée, les affûts et les caissons ; aux étages, les fusils et les armes de toute espèce. Vers l’extrémité méridionale et en dehors de l’enceinte, on bâtira une caserne pour les canonniers. Ce nouvel Arsenal, qui jouera un rôle important dans les troubles des premières années de la Révolution, sera en partie détruit, pendant le siège, dans la nuit du 25 août 1793, par l’explosion de la poudrière {voir le dessin p. 119). — Plus tard, il servira d’hôtel des Douanes et d’entrepôt pour les denrées coloniales ; puis, on y construira un Grenier à sel ; enfin, tous ces bâtiments disparaitront, sous le second Empire, pour faire place à des habitations particulières (voir les notes p. 119 et 121).


Nous allons, maintenant, parcourir le quartier de Villeneuve-le-Plat, sillonné, jusqu’à Bellecour, et jusqu’aux remparts du Rhône, par des rues perpendiculaires les unes aux autres. Si elles sont tracées régulièrement, ces rues sont encore très étroites : elles ont à peu près la largeur qui leur fut donnée en 1560 et 1561, lorsque Claudine Laurencin réalisa le projet de lotissement de cet immense territoire, qu’avait conçu son premier mari, Jean du Peyrat, et que la mort ne lui avait pas permis d’entreprendre. La rue Sala — du nom de noble François Sala, second mari de Claudine — n’a que dix-huit pieds de largeur (6m17) ; les rues Saint-Joseph, de la Charité, Laurencin (François-Dauphin}, Saint-Maurice (Saint-François-de-Sales) n’en ont que quinze à vingt ; la rue