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le lyon de nos pères

de ses ruines. Les chevaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem, après avoir possédé l’ancienne maison des Templiers, sur la rive gauche de la Saône, vinrent s’établir à Saint-George au commencement du xive siècle ;en 1492, ils firent de grandes réparations à l’église et, comme nous l’apprend l’inscription que nous avons lue tout à l’heure sur le grand portail de la Commanderie, Humbert de Beauvoir fil ensuite bâtir, tout à côté, cette vaste habitation et ses dépendances ; les armes de ce commandeur y sont plusieurs fois répétées. Rien de luxueux dans l'intérieur de cette maison de chevaliers. Et cette simplicité un peu austère ne changera pas, même après que l’ancienne Commanderie, maintenant érigée en

bailliage, sera devenue, au milieu du xviiie siècle, le siège du Grand-Prieuré d’Auvergne, et que le vieux château de Saint-George sera le lieu de résidence du Grand-Prieur, d’un chevalier receveur de l’Ordre et de deux secrétaires de la recette générale, d’autres chevaliers pourvus de différents titres et fonctions, d’un chancelier, d’un archiviste, d’un prêtre conventuel, vicaire général de l’Ordre, et d’un prieur-curé, sans compter le personnel particulier du Grand-Prieur, composé de valet de chambre, laquais, cocher, jardinier, portier et filles de service. La grande salle d’honneur, c’est-à-dire la salle du Chapitre, éclairée par deux grandes fenêtres, aura pour tout ameublement une longue table en chêne couverte d’un vieux lapis de moquette verte et de vieilles chaises garnies de la même étoffe, avec, aux parois tendues de cuir doré, les portraits des Grands-Baillis de Lyon, revêtus de leurs cuirasses. Dans la salle à manger, on remarquera un grand portrait, à cadre doré, du Grand-Maitre Lascaris et, au-dessus de la porte d’entrée, un autre tableau à cadre très simple, représentant la galère capitane de Malte. Tout le reste du logis conservera sa sévérité monacale.

Les hôtes de cette demeure ont une vie à part ; ils ne se mêlent point aux événements de la grande ville et, si parfois certains conflits ne venaient à s’élever entre l’Ordre de Malte et le Consulat, l’existence de la Commanderie serait complètement étrangère à celle de la cité. On y voit, du moins, de temps en temps, d’intéressantes cérémonies. Chaque année, la veille de la fête de sainte Eulalie, qui se célèbre le 10 décembre, les chanoines de Saint-Jean viennent officier en grande pompe, Quand Saint-George sera devenu le chef-lieu de la langue d’Auvergne, chaque année aussi, durant les trois premiers jours de juin, les chevaliers et commandeurs de l’ordre tiendront chapitre à la Commanderie ; le premier jour, avant l’ouverture des séances, le prieur-curé, accompagné de son clergé, ira les prendre dans la salle capitulaire pour les conduire à la messe solennelle du Saint-Esprit, et ce sera un fort beau spectacle que ce défilé de nobles chevaliers en grand costume, habit rouge galonné d’or, veste et culotte de drap gris-blanc, épée au côté, et croix de Malte suspendue au