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Gras comme un cayon. Voy. gras.

On dit encore à un ami qu’on n’a pas vu depuis quelque temps et qu’on retrouve florissant : Ça me fait plaisi de voir que te te portes comme un cayon.

2. Les cayons sont des soliveaux ou chantiers que l’on place sur le manteau qui couvre la trouillée lorsqu’on fait le vin, afin de combler le vide entre le manteau et le chapeau. Un chantier beaucoup plus gros qu’on place par-dessus se nomme caye (v. caye 2). Le peuple s’est plu à donner des noms d’animaux aux objets qui supportent. Comp. grue, chèvre, corbeau, poutre, sommier, grenouille (treuil) et le vieux lyonnais bochet (petit bouc), sorte de corbeau.

CEINTURONNIER, s. m. — Fabricant de ceinturons. Molard ajoute : « Dites ceinturier. » Et que non pas, bonnes gens ! Le ceinturier est un fabricant de ceintures, le ceinturonnier, un fabricant de ceinturons.

CELLE À… — S’entend de reste. Un monsieur en voyant passer une dame bien bâchée : C’est celle à M. le sous-préfet.

CELUI-LÀ-LÀ, CEUX-LÀ-LÀ. — Pléonasme toujours usité : Regarde voire ceux-là-là qui vont là-bas. Trois là.

CÈNE BÉNITE. — Petit gâteau rond et plat, sans beurre, rapport à la collation (ou à l’économie), fortement safrané, partant d’un jaune vif, que l’on vend le Jeudi-saint à la porte des églises. Sont-ils bons ? Cela dépend de l’âge de celui qui les mange. À sept ans, délicieux ; à soixante ans, exécrables. Le nom est un souvenir du pain consacré à la cène.

CENPOTE, s. m. — Fût de vin qui contient environ 105 litres. — Mot fait sur cent-pots.

CENSÉ, adv. — Censément (voy. ce mot). Il est venu à Noël, censé pour son oncle, mais c’était pour la Pierrette.

CENSÉMENT, adv. — Très jolie expression, impossible à rendre exactement en français de l’Académie. N’en déplaise à Littré, il n’a pas toujours le sens de « par supposition ». Ainsi, cette proposition : Nos ministres sont censément les valets des députés, et les députés sont censément les valets des voyous qui les élisent, ne saurait se remplacer par : « Les ministres sont par supposition les valets des députés, etc. », car ce ne serait pas une supposition du tout. Je traduirais volontiers censément par « comme qui dirait ». Ne pas confondre avec sensément. D’une dame on dit souvent : C’est censément sa femme. Censément, oui ; sensément, non ; insensément, souvent. – Dérivé de censé, pas censément mais sensément.

CENTAURE. — Une voix de centaure, Une très grosse voix. — Corruption de stentor.

CERCEAU, s. m. — Appendice de la Jacquard. Il se compose de deux barres de fer recourbées, placées au-dessous de la mécanique, et qui servent à supporter les cartons du dessin.

CERISES. — Être à ses cerises. C’est ne plus être apprenti, ne plus travailler pour le bourgeois, mais avoir son métier pour maitre.

Synon. Être à ses croûtes. (P. B.)

Les demoiselles de la rue Tupin font une bouchée de deux cerises (Breghot dit trois), et celles de la rue Mercière deux bouchées d’une cerise. Dicton un peu oublié, et sans doute inventé par une demoiselle de la rue Mercière pour faire croire à la petitesse de sa bouche.

CERMILLE, s. f. — Cerfeuil. De cermille frite sur les rissoles, c’est franc bon. — C’est cærefolium, où folium a été remplacé par milium, mil.

CERVELLE. — Cervelle de canut, Claqueret, fromage blanc. Hélas, une cervelle de fromage blanc n’annonce pas qu’on se nourrisse de truffes noires avec de chambertin.

CESSE. — N’avoir ni fin ni cesse que… Très usité. La langue un jour fourcha à l’un de mes amis : Figurez-vous, me disait-il, que ma femme n’a ni sin ni fesse que je la mène au bal de la Préfecture (textuel).

CHA. — À cha-un, Un à un ; À cha-deux, Deux à deux ; À cha-peu, Peu à peu. À cha-peu, en s’y reprenant tous les jours, c’est étonnant ce qu’on finit par faire d’ouvrage. C’est comme cela que se font les grosses familles. Maille à maille se fait l’haubergeon. C’est à cha-peu, chaque jour,