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cemard, etc. Canezard a été répandu par les petits journaux écrits en langage de Guignol, et qui ont ordinairement beaucoup plus d’argot parisien et de langue verte que de langage lyonnais.

CANICHE. — Jouer à caniche. Voy. classe. — De ce que, pour jouer à ce jeu, il faut tenir la jambe pliée comme celle d’un caniche.

CANICHET, s. m. — Jeu des gones. On le nomme le plus souvent quinet, quoique, proprement, le quinet soit un jeu un peu différent. C’est le même mot que callichet. La dérivation a dû se produire sous l’influence de caniche, jeu.

CANIF. — Tomber de canif en syllabe.Te sais, le Jules s’est décapiyé d’avec la Fanchette, mais c’est pour se capiyer avec la Claudia. Il est tombé de canif en syllabe. On s’explique très bien qu’aux noms barbares de Charybde et Scylla, le populaire ait substitué des mots qui n’ont pas entre eux un lien bien logique, mais qu’il comprend, tandis que, pour qui n’a pas lu l’Odyssée, Charybde et Scylla ne veulent rien dire.

CANILLES, s. f. — Jambes. Quand on va pour tirer, aux boules, c’est une politesse exigée que de crier par préalable : Gare les canilles, ceux qui en ont ! — De canne, avec le sufixe ille, indiquant le sens spécial de menus objets. Le nom de choses minces et longues est par gausserie appliqué aux jambes. On dit des flûtes, des picarlats, des broches, des canilles, etc.

CANNE. — Cannes à tordre, terme de canuserie. Grandes cannes rondes en poirier, autrefois en roseau, que l’on place dans l’enverjure de la chaine pour le tordage ou le remettage, afin de faciliter le purgeage des fils.

CANNELLES, s. f. pl. — Roseaux. Nous ons loué un petit vide-bouteille à la Pape. Y a une lône avé de vourgines, de z’ambres, de cannelles, et de sabots dans les gaillots. C’est tout plein champêtre. — Diminutif de canne.

CANON-KROUPP, s. m. — Se dit, dans le monde des artilleurs, d’une dame fortement hanchée : C’est un beau canon-kroupp.

CANON, s. m., terme de canuserie. Roquet à une tête. Lenom a été donné à cause de la forme.

CANTINE, s. f. — Bocal en verre, de forme cylindrique, avec une très large ouverture dans le haut, et qui sert à mettre les fruits à l’eau-de-vie, cerises, griottes, prunes, pelosses, cerneaux, abricots, pêches, raisins, chinois, nèfles du Japon, alises, sorbes, merises, azeroles, etc. Des fois, pour que le pied soit plus solide, la cantine a un trottoir autour. On connait les bonnes ménagères et les bonnes maisons à ce que leurs placards ont des cantines à regonfle. — De cantina, en italien petite cave.

CANTRE, s. m. — 1. Ustensile qui porte les roquets pour l’ourdissage.

2. Ustensile qui porte les bobines pour certains métiers de façonnés. — De canterius, qu’on trouve dans Columelle pour un appareil qui a quelque analogie de forme avec les nôtres.

CANULER, v. a. — Importuner, ennuyer fortement, en parlant des personnes. On ne citerait pas ici ce mot, d’argot parisien, s’il ne donnait lieu à un souvenir lyonnais. En 1840, si je n’erre, M. D… était président du tribunal de commerce. Très capable, mais vif, il fut un jour si fatigué du verbiage d’un avocat, qu’il s’oublia au point de s’écrier : Maître un tel, vous voyez bien que vous canulez le tribunal ! L’effet fut immense ! Quoiqu’on ne connût pas encore les grèves, l’Ordre en fit une, et nul avocat ne voulut plaider devant le président. Stanislas Clerc fit quelques gorges chaudes de l’affaire dans son Tour des deux quais, que publiait périodiquement le Censeur. N’osant reproduire le mot, il le traduisit chastement par médicamenter. L’affaire dut pourtant s’arranger, car je vois que les avocats plaident encore devant le tribunal de commerce.

CANUSERIE, s. f. — Art de la soie. C’est un bel art, et qui n’est pas si facile que ça. Pour être bon canut, il y faut beaucoup d’ême. — Fait sur canut, avec le suffixe collectif erie. Comp. coutellerie, confiserie, ete.

CANUT, USE, s. — Ouvrier, ouvrière en soie. Les canuses sont renommées pour