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POIRE. — Poire à deux yeux, Enfant. J’ai quatre poires à deux yeux. — Ça vous fait ben un joli dessert ! Hi, hi, hi !

Poire-Saint-Martin, Fruit de l’aubépine. — Parce que le fruit est dans son éclat à le Saint-Martin.

POISON. — Nous le faisons féminin. Lorsque Jérôme Coton, dans les drames où il tenait les grands premiers rôles, allait pour boire la coupe empoisonnée, de toutes parts dans la salle, on lui criait : Cadet, méfie-toi, c’est de la poison ! — C’est le genre ancien, conforme à l’étymologie potionem (d’où potion et poison, c’est souvent tout un). « Du jus de ta poison, » dit le gentil Ronsard.

POISSON. — Prendre un poisson, Mettre le pied dans un ruisseau, dans un gaillot.

POITRINE. — Tomber sur la poitrine. C’est assez connu de tous nos anciens que lorsque les rhumes de cerveau tombent sur la poitrine, ça fait intelligiblement beaucoup tousser.

POIVRE. — Ch… du poivre (parlant par respect). Voy. ch…

Le poivre noir est le meilleur. Voy. blonde.

Loup de poivre. Voy. loup.

POJAUD, s. m. — Homme sale, dégoûtant, avec le sens particulier de rustre. — Beurre de pojaud. Voy. beurre. Le bâton du pojaud, Une canne grossière et telle qu’il convient à un rustre. Quand les petits gones ne sont pas sages, le papa dit : Attattends ! je vas aller chercher le bâton du pojaud ! — De pège, avec le suffixe péjoratif aud. Le pojaud est un homme gluant comme s’il venait d’être trempé dans la pège.

POLACRE, s. m. — Flagorneur, hypocrite. Mlle  Fannie, n’écoutez pas le Michel, i fait son polacre. — C’est Polaque, Polonais, de Polachie. Comp. boîme, Bohème.

POLI. — Poli comme la poignée d’un battant qui a servi de père en fils. Voy. battant.

Poli comme une queue d’ours. Se dit d’un personnage très grossier. Le proverbe est-il bien appliqué ? On m’assure que les ours n’ont pas de queue.

Poli comme un noyau de péche (Les Bourgeois militaires, poème lyonnais du xviiie siècle, Ém. Vingt.).

POLISSOIR, s. m., terme de canuserie. — Lame de corne et quelquefois de métal, arrondie et mousse, que l’on passe sur la façure tendue pour faire briller l’étoffe et égaliser les coups de trame. Au fig. Passer le polissoir, Passer l’éponge, oublier une offense.

POLISSON, s. m. — Tournure postiche que les dames portaient eu temps de Mme  de Genlis et qu’elles se sont remises à porter naguère. — Bien mal nommé, car rien d’horrible comme ces apponses hottentotes. Une jeune dame, au temps de ces postiches, disait un jour à l’un de mes amis : N’est-ce pas que ces tournures vont très bien à la toilette ? — Ah ! Madame, répondit-il, je suis de l’avis de Boileau :

Rien n’est beau que le vrai, le vrai seul est aimable.

2. Croûte de pain frottée d’ail que l’on met dans la salade (voy. chapon). — Pour ce dernier sens, vient peut-être de ce qu’on lui attribue, bien à tort, une vertu aphrodisiaque.

POLITESSE. — Faire une politesse, Offrir quelque chose pour la buvaison ou pour la chiquaison, depuis le petit verre jusqu’au diner à s’oublier partout. L’art. X des lettres patentes pour la fondation de l’Académie du Gourguillon est ainsi conçu : « Le diplôme… sera délivré gratis à chacun des membres. Mais il n’est point à iceux interdict de s’en recognoistre par une petite politesse. »

POMME. — La Pomme d’Adam. C’est, au dire des médecins, la saillie formée par le cartilage thyroïde à la partie antérieure du cou de l’homme, mais personne n’ignore que c’est un quartier de la pomme qu’Adam a mangée dans le paradis terrestre, et qui est restée là. Et la preuve, c’est que les femmes ne l’ont point.

Pomme d’amour, 1. Tomate. Ce mot est venu de la Provence.

2. Fruit du pommier d’amour (voy. ce mot).

POMMÉE, adj. — Une bêtise pommée, Une très forte bêtise. Analogie avec les choux, les laitues qui n’ont leur plein développement que lorsqu’ils sont pommés.

POMMIER. — Pommier d’amour. Tout petit arbuste de nos jardins, que l’on cultive en