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LÈCHE, s. f. — Tranche extrêmement mince. « Longues et larges lesches du gras jambon, » dit le débonnaire Eutrapel. Au fig. Un tant soit peu. « Des ce qu’il illucesce quelque minutule lesche de jour, » dit le tant gracieux Rabelais. — Coco, veux-tu de viande ? — Voui, p’pa, donnez-me n’en un troc. — Veux-tu de pain ? — Voui, p’pa, donnez-me n’en une lèche. — Il semble naturel de voir dans lèche un subst. verbal de lécher, la lèche étant si mince qu’elle peut être considérée à l’égal de la trace de la langue. Il n’en est rien. L’s du vieux franç. aussi bien que des formes provenç. indique pour origine le vieux haut allem. lisca, roseau, laiche, « carex ». La lèche est considérée comme aussi mince qu’une feuille de laiche ou de roseau.

LÈCHE-C… (parlant par respect). — 1. Individu qui sait gratter la rogne ; flagorneur. Je vois bien des gens dans les bonnes places qui n’y ont d’autre titre que celui de ce paragraphe.

2. Voy. biscuit.

LÉCHER. — Lécher le miel sur l’épine, Prendre un plaisir dans un moment critique ou dans le malheur. M. X…, le marchand, va lever le c… un de ces quatre matins, et sa femme qu’a mis au levain ! — I lèche le miel sur l’épine !

S’en lécher les cing doigts et le pouce. Se dit d’une friandise que l’on apprécie. S’emploie au fig. La Catherine n’est pas jolie. — Pas jolie ! Je m’en licherais les cinq doigts et le pouce !

LENCANER (SE). Voy. lenticaner (se).

LENDES, s. f. pl. — (Parlant per respect), Œufs de poux. — De lendem, même sens.

LENTIBARDANER, v. n. et réfléchi. — Flâner avec « volupeté ». — « Quand on se n’aime, — C’est si canant, — Qu’on va toujours se lentibardanant, » dit la célèbre chanson de Fanchon. — Hier à soir, l’un de nous, le norable Barthazard Claqueposse, en se lentibardanant sur le quai des Puces… (Cirqulaire). — Composé de lent et d’un fictif bardaner, fait sur bardane. Se lentibardaner, marcher lentement et agréablement à la façon d’une bardane qui se promène. D’ailleurs les bardanes ne sont pas des cerfs.

LENTICANER, v. n. et réfl. — Flâner avec indolence. Ét. Blanc donne la forme lencaner, qui me paraît inusitée. C’est jord’hui dimanche. Nous vons nous lenticaner un m’ment vè Saint-Clair. — Composé de lent et d’un fictif caner, marcher lentement et en se balançant comme une cane, parce que le flaneur se dandine.

LENTILLÉ, ÉE, adj. — Qui a des taches de rousseur. La Tiennette serait jolie si elle était pas tant lentillée qu’on dirait une indienne à pois !

LESSIF, s. m. — Lessif sec. C’est le nom que ceux qui veulent bien parler donnent aux cristaux de potasse. Chez maint espicier vous pouviez lire jadis sur un carton pendu : lessif sec. On appelle cela plus simplement du lissieu sec, mais aujourd’hui tout le monde dit du cristaux. — Lessif est un masculin fait sur lessive. Le v final s’est durci en f par la spontanéité des lois phonétiques. Comp. veuf, de veuve.

LEVAIN. — Mettre au levain, Devenir enceinte.

LÈVE, s. f., terme de charpenterie. — Tranche d’une pièce de bois enlevée pour l’équarrir. — Subst. verbal de lever, au sens d’enlever.

LEVÉE, s. f. — C’est le nom qu’on donne à la corée lorsqu’elle est cuite. À Nyons, on dit levadette.

LEVER, v. a. — Enlever. Lever la petariffe. Se dit d’un mets très épicé qui emporte le palais. Au figuré : I nous a dégobillé un discours qui levait la petariffe.

Lever le couvert, la nappe, la table. Bien qu’on ne rencontre pas ces expressions dans le dictionnaire, je les crois correctes. Table est une métonymie pour « ce qui garnit la table ». On connait le vers de Boileau : « En vain à lever tout les valets sont fort prompts. »

Lever le coude. Voy. coude.

Lever la flotte. Voy. flotte.

LÈVE-GROIN, s. m. — Fille évaporée qui a toujours le groin en l’air.

LÉVITE, s. f. — Redingote. Je me suis fait faire une lévite pour ces fêtes. Ce mot était très courant dans mon enfance.