Page:Le Littré de la Grand'Côte, éd. 1903.pdf/213

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Alors il a battu Janot. J’y ai plus rien dit, j’ai vu que ça lui faisait de la peine. — L’idée est certainement « agir, parler en Janot (Janot en vieux français égalait caquenano ; comp. Jocrisse) », mais pour- quoi « battre » ?

JAPPE. — Avoir bonne jappe, Avoir bonne langue, Être éloquent. M. Glapissant, l’avocat, est-ce un grand talent ? — Oh, je crois ben, il a bonne jappe ! I te vous parle deux heures sans moucher ni cracher.

JAPILLER, v. n. — Bavarder, Parler avec volubilité et inconsidérément. — C’est japper, avec le suffixe fréquentatif iller.

JAPPILLAGE, s. m. — Bavardage, sots contes. Voyons, vas-tu te fâcher pour ça ? Te sais bien ce que c’est que le jappillage des femmes !

JAQUILLER, v. a. — Jacasser, bavarder d’une façon fatigante. — Fait sur jaque, jacques (voy. ce mot).

JARDIN. — Le Jardin de la France. Voy. Guille.

JARDINAGE, s. m. — Hortolage, légumes. On ne peut pas faire un bon diner sans jardinage.

JARDINIÈRE, s. f. — Taupe-grillon, grillotalpa. — De jardin, avec le suffixe ière, comme courtilière de courtil.

JARDU, s. m. — Homme sale, dégoûtant. Il est devenu suranné, mais est encore en usage à Rive-de-Gier. Les jardus de la Grenette. C’était un vieux dicton qui n’avait sans doute d’autre origine, sinon que la plupart des quartiers avaient leur sobriquet injurieux. — Probablement de jarde, tumeur phlegmoneuse au jarret du cheval. Le jardu, primitivement, était celui qui avait des ulcères aux jambes, auxquelles le populaire attribuait un caractère syphilitique. De là le sens s’est étendu à homme malsain, dégoûtant.

JARLOT, JARLON. Voy. gerlot.

JASERON, s. m. — Chaîne d’or à plusieurs rangs que les femmes se mettaient autour du cou. On connaissait la dot d’une fille au nombre des rangs. Je me rappelle encore le jaseran (c’est le nom dans nos campagnes) de ma nourrice, avec sa belle plaque, qui me tirait les yeux. Primitivement jazerenc était un adjectif qui signifiait de mailles. Trestut le cors et l’osberc jazerenc, « tout le corps et le haubert à mailles ». (Roland, v. 1604). Puis jazerenc est devenu un substantif qui a servi à désigner le haubert. Au temps de Rabelais, il avait déjà notre signification. « Les patenostres, anneaux, jazerans, carcans estoient de fines pierreries. » — De l’espagnol jazarino, algérien.

JEAN BROCHE. — Surnom donné aux petits garçons. Jean (lors même qu’il s’appellerait Magloire) Broche (lors même qu’il s’appellerait Bousinet), va donc m’acheter pour deux sous de tabac ! — À la maison quand on n’appelait pas Lustucru (c’était moi), ou bien Coco (c’était moi), on appelait Jean Broche (c’était moi). — De broche, objet fluet et petit.

JEAN-DU-SIAU, s. m. — L’annulaire (voy. cortiaud).

JETER, v. n. — Suppurer, en parlant d’un abcès, d’une plaie. Sa postume jette. — C’est l’abréviation de jeter de borme (v. borme).

Ne pas jeter les épaules de mouton par la fenêtre, Voy. épaule.

JETU, s. m. — Instrument composé d’une poche au bout d’un long manche, et dont on se sert pour couler la lessive. « Un gettoir de lissive, » dit un Invent. de la Manécanterie, de 1633. — De jeter, avec le suff. u, représentant orem.

JEU. — Ce n’est pas de jeu. Se dit de toute chose non loyale. C’est le foul play des Anglais.

JEUDIS. — La semaine des quatre jeudis. Cela vaut autant à dire comme en mil huit cent jamais. Je le savais et pourtant cette semaine des quatre jeudis sonnait à mon oreille comme un idéal merveilleux, après lequel je soupirais sans espérer de l’atteindre ! Toute notre vie, hélas ! se passe à attendre la semaine des quatre jeudis.

JEÛNE. — Jouer à la jeûne. Si vous êtes trois, par exemple, à jouer aux gobilles à poque avant pot, il y en a un, compréhensiblement, qui restera le dernier à faire