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GRISPIPI. — À la grispipi, À la gribouillette, à tire-cheveux. Jeter des dragées à la grispipi. — D’une racine german. greip, grip, avec un suffixe comique de fantaisie. C’est peut-être par analogie avec graspille (voy. ce mot) que grip est devenu grisp.

GROBE, s. f. — Grosse bûche, quartier de bois ; spécialement ce qui reste d’un tronc coupé. La grobe de Noël, Énorme bûche que l’on réservait autrefois pour la nuit de Noël. Au fig., quelqu’un de lourd, qui ne remue pas facilement. Ma fenne, autant une grobe. Voy. dégrobé, et agrobé. De l’allem. grob, gros, épais, arrondi. Il y a bien de cela dans une grosse femme.

GROBILLON, s. m. — Un rondin de bois. Grobillon, petite grobe.

Se tenir à grobillon, Se tenir ramassé en rond. — De grobe, parce que la grobe est ramassée, pelotonnée ; elle ne s’étend pas en branches.

GROBON, s. m. — 1. Petite bûche en forme de grobe. Grobon, petite grobe.

2. Beignet. — De grobe, le beignet représentant une agglomération de pâte autour d’un noyau, assez analogue de forme au quartier de bois formant grobe.

Prendre son grobon, S’enivrer. L’idée est : se réduire à l’état de grobe.

GROGNON. — Une Marie Grognon. Se dit d’une femme qui ne fait que grogner. — Molard proscrit le mot de grognon, et, de fait, en son temps, il ne figurait pas au Dictionn. de l’Acad. Mais que de mots bannis par les purs ont ainsi fini par conquérir droit de cité !

Le grognon du pain. Voy. grougnon.

GROIN, s. m. — Seule expression admise pour visage. Le p’pa : Jean-Jean, va te décochonner, t’as le groin sale.Jean-Jean, surpris : Mais p’pa, je m’ai lavé le groin dimanche, et je sommes que jeudi ! L’usage est ancien. Au xviie siècle, Dame Gervaise s’écriait : « Que veux-tu dire, groin tiré ? »

GROIN-D’ÂNE, s. m. — Crépide à feuilles de pissenlit, barkausia taraxacifolia. On prétend que le nom vient de ce que les ânes sont friands de cette plante, mais la dérivation logique ne s’y prête pas. Le nom doit plutôt être tiré de quelque rapport de ressemblance que je ne saisis pas.

GROLIER, s m. — Savotier. Vieilli. On dit communément regrolleur ou peju. Cependant j’ai entendu quelquefois mon père dire en plaisantant : Je vais chez le grolier. En 1421, Jehan le Grolier réparait les tybiaux (bottes d’égoutier). — De grolla, avec le suffixe des noms de métier.

GROLLE, s. f. — Savate, vieux soulier éculé. Traîner la grolle, Être dans la misère, avec sens péjoratif. — Subst. verbal du vieux prov. crollar, de corotulare, branler, remuer.

Passe la grolle, la grolle, la grolle, jeu du furet mis à la portée des gones qui ne vont pas nu-pieds.

GROLLON, s. m. — La même chose que grolle, avec sens encore plus péjoratif. De grollons à soupape, Des souliers qui prennent l’eau. S’emploie aussi pour soulier. S’acheter de grollons neufs.

GROS. — Le gros de l’été, le gros de l’hiver, Le cœur de l’été, le cœur de l’hiver. Au gros du soleil, à la grosse chaleur, et autres expressions semblables.

Être d’un gros sang. Se dit des personnes rouges et sanguines.

De gros en gros, Approximativement, sans entrer dans le détail. Faire une chose de gros en gros, La faire à la six-quatre-deux.

Coûter gros.Cette campagne a dû coûter gros d’argent. — On ne l’a pas rien eue pour des mouchons de chandelles ! On dit aussi Avoir gros de peine, beaucoup de peine.

Le Gros visage… « Laissez-le sêrement asseoir son gros visage sur la chaise ancurule de la Chambre nationâle.. » (Cirqulaire, juin 1831.)

GROS, s. m. — Sorte de charbon. Voy. grêle.

GROS-BLÉ, s. m. — Blé de Turquie. Une paillasse de paille de gros blé.

GROSSE. — La Grosse, Nom que l’on donne des fois à la bourgeoise, lors même qu’elle serait maigre. Te viens tout seul ; t’as pas amené la grosse ? Ce terme nous vient de la campagne, où le mari s’appelle aussi le Gros. De 1830 à 1840, il se passa dans la canuserie le phénomène inverse d’aujourd’hui, où les canuts quittent la ville. À cette époque des gens de la campagne envoyaient leurs enfants en apprentissage