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GADRUE, s. f. — Prostituée du trottoir. Terme bas. — Je croyais ce mot emprunté à l’argot, mais je ne j’ai rencontré dans aucun dictionn. d’argot. Quelques formes dialectales peuvent faire songer à l’étymologie gadoue.

GAFFE, s. f. — Acte de sottise, maladresse. Figure-toi que j’ai fait une gaffe. On dansait à la Préfecture. J’ai dit à un mecieu à côté de moi : « Connaissez-vous cette grande fantôme de femme, qui danse en se dégôgnant ? » — « C’est ma femme, » qui m’a dit. — Moi, pas bête, j’ai raccommodé les épinards. J’y ai dit : « C’est pas celle-là que je voulais dire : c’est l’autre, la petite. » — Subst. verbal de gaffe.

À la gaffe du mortier, terme de maçonnerie. Se dit d’une pierre posée à bain de mortier : il faut que la pierre « gaffe » dans le mortier, par conséquent qu’on n’économise pas celui-ci.

GAFFER, v. a. — Patauger dans un liquide en le faisant rejaillir. J’ai gaffé dans la bassouille, qu’i m’en a jiclé dans les chelus. — Le provençal ayant gafa, passer à gué, le mot peut venir de vadum, mais l’insertion de f est assez difficile à expliquer. Serait-elle due à l’influence de gaffe, parce que, pour passer à gué, on sonde l’eau avec une gaffe ?

GAFFOUILLER, v. n. — Même sens que gabouiller. — De gaffer, avec un suffixe ouiller, exprimant le rejaillissement de l’eau.

GAGA, s. m. — Sobriquet donné aux gens de Saint-Étienne. Onomatopée destinée à exprimer le balbutiement ; d’où le nom de gaga, aussi donné aux crétins.

GAGAILLE, s. f., parlant par respect. — Flux de ventre. Avoir la gagaille, Avoir perdu sa clef. — Corruption de cacaille, moins commode au prononcer.

GAGE, s. m. — Le gage d’une bonne. Il paraît que gage, en ce sens, ne doit prendre que le pluriel. Que la crique me croque si j’en savais rien !

GAGES, s. m. pl. — Revendeur de gages, Marchand de meubles de rencontre. Pourtant des revendeurs de gages fournissent aussi des meubles neufs. Autrefois, ces marchands étaient tous au Puitspelu ou en rue du Bœuf. Puis il s’en est établi cours Bourbon, aux Brotteaux. — De ce qu’à l’origine le fond de ces magasins se composait principalement d’objets remis en gage contre des prêts d’argent, et vendus par suite de non-remboursement. Ce nom de gages s’est étendu dans la Basse Auvergne au sens général de meubles, objets mobiliers et même de troupeaux. M. Malval cite le piémontais gagi, même sens, mais Ponza ne le donne qu’au sens de « pegno, testimonianza ».

GAGNER. — Gagner à son avantage. On veut proscrire cette charmante expression de bienveillance, sous le prétexte qu’on ne peut gagner à son désavantage.

Gagner sa vie à reculons. C’est ce que font les cordiers.

Gagner son avoine, son foin. Métaphores élégantes pour « gagner sa vie ».

GAI, adj. — Se dit de tout objet trop lâche et qui vacille dans son alvéole. Un péne trop gai, Une clef trop gaie, Un piston un peu gai. Par métonymie, Un chapeau trop gai, Un chapeau trop large, et mille autres objets dans tous les genres. C’est une assez singulière dérivation de sens du franç. gai sous l’idée de « remuant », mais qui a son analogie dans la locution : « cette clef, ce piston jouent bien. » Si l’on joue, c’est qu’on est gai, croyablement.

Gai comme la porte de Roanne. Se dit d’un visage de jugement dernier. On sait que l’architecte Bugniet avait donné un caractère féroce à la porte de la prison de Roanne, au lieu où s’élève maintenant le Palais de Justice.

GAILLOT, s. m. — Flaque d’eau généralement malpropre. Les ordonnances du consulat obligeaient les Lyonnais à porter leurs équevilles dans un grand fossé appelé le Grand Gaillot.

De gaillot en gaillot j’ai gaffé jusqu’à toi !

a dit notre grand Hugo.

Parlant par respect, L’âne va toujours pisser au gaillot. Manière de dire que l’argent va toujours aux riches.

Ce mot parait avoir pour base une onomatopée gail, exprimant le rejaillissement de l’eau. Cependant on trouve en celtique kail, boue.

GALAN, s. m. — Ficelle bien tordue que l’on serre fortement autour d’une fiarde, et qu’on déroule en lançant celle-ci. — Vraisemblablement forme de galon.