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FOURCHE, s. f. — Angle que forment les deux cuisses. Quand j’étais gone, à Sainte-Foy, il me survint une enflure douloureuse à la partie inférieure du tibia. C’était sans doute une petite périostéite circonscrite, à la suite de quelque contusion passée inaperçue. On fit venir le père C…, vieil officier de santé qui, pour le choléra, croyait fermement à l’empoisonnement des puits par des gens payés par Louis-Philippe. Il diagnostique une tumeur en voie de formation, fait mettre des émollients, qui agirent comme un notaire sur une jambe de bois. Rien n’y faisant rien, on fit venir une rhabilleuse de Saint-Just, qui examina le mal longtemps, et déclara gravement que je m’étais fait un détour à la fourche (!!!). Elle me tiripilla la fourche pendant un bon quart d’heure, après quoi elle déclara que c’était remis. Mais il n’y eut de remis que la pièce de quarante sous qu’elle se fit remettre. — Enfin la bonne Nature fit la guérison, en dépit des médecins et des rhabilleuses. — Vieux français forcheure, même sens, de forche, fourche.

FOURCHETÉE, s. f. — Une fourchetée de salade, Ce qu’en peut piquer une fourchette. Interdit par les clercs. Et ils disent cuillerée, de cuiller, comme nous disons fourchetée, de fourchette ! (Littré a cependant admis fourchetée.)

FOURCHETTE, s. f. — Creux de l’estomac, Les côtes inférieures viennent en effet y former une fourche.

Avoir mal à la fourchette. Recevoir un coup de poing à la fourchette (très mauvais). — Vieux franç. forcelle. Au xviie siècle on disait encore la forcèle de l’estomac pour le creux de l’estomac.

Marquer à la fourchette. Se dit lorsque, au jeu, billard, dominos, cartes, etc., on marque plus de points que l’on n’en a fait. — De ce que, avec une fourchette, on fait quatre raies au lieu d’une. — Par extension, se dit d’articles exagérés dans un compte. Par exemple les maçons ayant l’habitude de la fourchette, ils portent communément : « Fourni 100 tuiles, » sous-entendu à diviser par 4.

FOURCHU. — Pied fourchu. Molard, en donnant cette expression, ajoute : « Droit qui se paye sur les bêtes qui ont le pied fendu ou fourché. Dites pied fourché. » L’Académie dit aujourd’hui : « Pied fourchu, pied fendu des animaux ruminants. »

FOURMIS. — Avoir les fourmis aux pieds, Y avoir des fourmillements. Dans l’expression lyonnaise, l’image est bien plus forte.

FOURRAGER, v.a. — Chasser bruyamment, chasser en frappant. J’ai fourragé le chat qu’était après mes canaris. — Dérivation de sens du français fourrager appliqué activement : « Fourrager un pays. » Nous l’avons appliqué aux personnes.

FOURVIÈRES. — Une vieille chanson lyonnaise à danser dit :

Vira ton c…

Du côté de Fourvières ;
Vira ton c…

Du côté de Saint-Just !

Ma pauvre mère me le chantait toutes les fois qu’elle venait pour me bailler un remède.

FOUT’ FOUT’. — Fout’, fout’, c’est le jurement des chats. Les chats ne péchant pas, on admet que jurer comme eux, ce n’est pas pécher.

FOUTAISE, s. f. — C’est de la foutaise, C’est une chose sans valeur. Tout ce que tu dis là, c’est des foutaises. Le bon Littré a admis fichaise, qui en est un diminutif. C’est peut-être étendre un peu trop loin pour le français les devoirs de l’hospitalité.

FOUTIMASSÉ, ÉE, adj. — Je suis tout foutimassé, ce matin, Je me sens mal en train, mal disposé. Il est un peu bas, et il est mieux d’employer nos bonnes vieilles expressions lyonnaises : « J’ai la v… du, etc. tournée, » ou d’autres de ce genre.

FOUTRAU, s. m. — Tumulte, violences, coups. Eh ben, as-tu vu ce foutrau à la Chambre ? — Le foutrau était un ancien jeu de cartes où les as se livraient combat. — L’origine est évidemment le verbe f… Foutrau, action de se f… des coups.

Il a pris son foutrau. Se dit de quelqu’un qui s’emporte brusquement.

FOUTRAUD, AUDE, s. — Benet, caquenano. Même origine que le précédent, mais f… n’a ici qu’une signification méprisante. Comp. f… bête.

F…ICHER, F…ICHU. — S’emploient dans diverses locutions. — Au sens de fait. Il ou elle est bien f…ichu à ma fantaisie. Se dit d’un joli tableau, d’une jolie femme,