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des noces : Ben, Pierrette, comment que ça s’est passé ? — En commençant il était tout entrepris ; moi pas.

ENVERJURE, s. f., terme de montage de métier. — Mode de croisement des fils de la chaîne. Ce croisement des fils passés alternativement un à un entre deux chevilles a pour but de maintenir aux fils de la chaîne dans l’ourdissage leurs places respectives, et de faciliter la recherche du fil qui casserait et qu’il faudrait remplacer pendant l’opération. L’enverjure est pratiquée non seulement sur l’ourdissoir, mais encore au pliage sur le métier à tisser.

ENVERS, — Se coucher à l’envers, Se coucher à bouchon.

EN VEUX-TU, EN VOILÀ. — À regonfle, à foison. J’ai été à la soirée de Mme de Saint-Oiseux. — Qu’y avait-il ? — Y avait des tetons en veux-tu, en voilà.

ENVIRONS. — J’irai te voir aux environs de Noël. Chinoiserie de la grammaire. Environ peut se dire du temps et des lieux, et aux environs ne peut se dire que des lieux.

ÉPARGNEUX. — Épargneux comme un Auvergnat.

ÉPARVÉRER, PARVÉRER, v. a., terme de bâtisse. — Polir un enduit à l’éparvier.

ÉPARVIER, s. m. — Outil qui sert à polir l’enduit. — D’épervier, oiseau, parce que l’outil a quelque analogie lointaine avec un grand oiseau ayant les ailes étendues.

ÉPAISSEUR. — Ça commence à se tirer d’épaisseur. Se dit lorsqu’un ouvrage s’avance. Mon recueil de poésies commence à se tirer d’épaisseur. — Terme emprunté à la menuiserie. Une planche est tirée d’épaisseur, lorsque, en la rabotant, on l’a mise à l’épaisseur voulue pour pouvoir la travailler.

ÉPAULE., — Épaule de mouton. Ce mot n’est-il pas cent fois meilleur qu’éclanche ? Sentir l’épaule de mouton. Se dit de quelqu’un dont le corps n’exhale pas une odeur de rose thé. En partie tous les hommes sentent l’épaule de mouton, disait un jour notre petite apprentisse. — Te les a ben si bien sentus ! répondit la bourgeoise.

Il ne jette pas les épaules de mouton par la fenêtre. Se dit de quelqu’un qui n’attache pas ses chiens avec des saucisses.

Large des épaules. Se dit d’un avaricieux. L’idée est : « Il est large… mais seulement des épaules. »

Carré des épaules. Voy. Carré.

ÉPÉE. — Épée de Couzon. Voy. Couson.

Épée à deux poings. Même genre que l’Épée de Couson.

Jouer de l’épée à deux jambes, Se sauver.

ÉPIER, v. n. — 1. Se dit du blé quand le grain se forme dans l’épi. Ce beau temps va faire épier le blé.

2. Éclore, en parlant des œufs. « Pendant ces quinze ans, disons-ju, la France couvait le cacou de la liberté, qu’a-t-épié au mois de juillet, » (Ét. Blanc.) — D’épi. On dit que le blé épie quand le grain apparaît. On a vu une analogie entre le grain qui sort de l’enveloppe, et le poulet qui sort de l’œuf.

ÉPILLOCHER. — Voy. dépillocher.

ÉPINARDS. — Raccommoder les épinards. Se dit d’un moyen employé pour réparer une sottise que l’on a lâchée. Y a le père de Filouchon qu’il est connu pour piquer l’once. J’y ai pu pensé, et j’y ai dit devant le fils : « Tous ces piqueurs d’once, on devrait les flanquer aux galères ! » Filouchon est devenu rouge comme un coq nigaud. J’ai vu que j’y avais fait un pied-failli. J’ai vite ajouté : « Je dis pas rien ça pour ton pipa ! » Comme ça, j’ai raccommodé les épinards.

Lorsque, à table, vous servez des épinards à une dame, c’est une plaisanterie de bon goût de lever la cuillère bien haut, puis de flanquer le contenu avec force dans l’assiette, comme un maçon jette une truellée de mortier contre un mur. Quoique ça, bien prendre garde que les épinards ne jiclent pas sur la robe de la dame. C’est cette fois que l’on ne pourrait pas les raccommoder, les épinards !

Épinards rouges, Arroche.

ÉPIPACUANA pour Ipécacuanha. — Cette transformation s’est opérée ensuite de la tendance à répéter la consonne qui existe déjà dans un mot. Comp. reguingote pour redingote, carcabeau pour cartabeau, cancorne pour guinterne, etc.