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tournée ! Par extension, se dit de toute personne gênante, encombrante. — Dans le grand monde : Ma femme, quel emplâtre ! Pour voyager, il lui faut toujours quatre chapelières et cinq cartons, sans compter les sacs !

EMPLÂTRER, v. a. — Souiller, surtout de quelque chose d’adhésif. Le Jules, tout son badinage, c’est de pitrogner de la bouse, et puis i me revient tout emplâtré.

EMPOIGNÉE, s. f. — Dispute violente, accompagnée parfois d’arguments frappants. À la Chambre il y a constamment des empoignées.

EMPOISONNER, v. n. — Répandre une mauvaise odeur. — Une mère à son fils qui l’embrasse : Pouah ! t’empoisonnes la pipe ! Une femme, inquiète, à son mari qui l’embrasse : D’où vient donc que t’empoisonnes le musc ? — Une petite fillette d’une douzaine d’années se confessait au vénérable curé de Saint-Polycarpe. Après les aimables péchés sans importance d’une jeune vierge, tout d’un coup elle s’arrête, puis hésitant beaucoup, rougissant, balbutiant, elle dit : — Mon père, je m’accuse encore… d’avoir… empoisonné… ma mère !

— Ô mon Dieu ! fit le digne prêtre en bondissant. Petit monstre ! Si jeune ! et comment avez-vous fait ?

La fillette partit en sanglots : — Mon pè… è… re…, voilà… à… à… ! J’étais assise sur maman… an… Tout à coup elle m’a poussée par les épaules en me disant : Peux-tu te sauver, petite cayonne, tu m’empoisonnes !

Voilà les inconvénients de ne pas parler proprement lyonnais. Si cette jeune personne s’était accusée d’avoir emboconné sa mère, au lieu de l’avoir empoisonnée, le confesseur n’aurait pas eu un instant d’hésitation.

EMPOTIQUER, v. a. — Hypothéquer. — Substitution du préfixe usuel en à la syllabe étrange hy. Pourtant nous ne disons pas une empotique, mais une impotèque.

EMPOUTAGE, s. m., terme de canuserie. — Opération qui consiste à faire passer les arcades dans la planche à collets et dans la planche à arcades, suivant l’ordre déterminé pour produire le dessin. On distingue l’empoutage suivi, l’empoutage à pointe, l’empoutage à pointe et retour, l’empoutage sur deux corps, etc. Le fabricant figure l’empoutage par un dessin. Symboliquement : Te vas te marier. Tâche moyen de faire un bon empoutage, pour ne pas bousiyer le dessin.

EN, prép. — 1. Pour « dans la ». En rue du Cornet, en rue Treize-pas, au lieu de dans la rue, etc.

2. Pour « à ». Je vais en Serin, en Bellecour, au lieu de à Serin, etc. — Latinisme excellent, employé par les meilleurs auteurs du xviie siècle. Pourquoi dit-on Jeter en Saône et Jeter au Rhône ?

ENCARPIONNÉ. — J’entendais dire un jour à un bonhomme : Mon fils est encarpionné de cette fumelle ! Je crus à l’un de ces mots « éjaculatoires », réunion de syllabes péjoratives qui sortent dans le discours presque sans le vouloir. Mais il me fallut reconnaitre que le mot avait des ancêtres, lorsque je rencontrai en piémontais ancarpionè, féru d’amour. — Je le suppose fait sur arpion, avec le préfixe en et l’insertion de la syllabe péjorative ca : en-ca-arpion-né. Littéralement, « les arpions de cette femme se sont incrustés dans sa chair ».

ENCATONNÉ, ÉE. Voy. catonné, ée.

ENCHANT, s. m., terme de construction. — 1. Angle d’une maison ou d’un mur.

2. Pierre servant à bâtir les enchants. — De cantus, bord aigu, coin ; d’origine celtique.

ENCLUSEAUX, s. m. pl., terme de charpenterie. — Remplissages en bois placés entre les têtes des tras, dans un plancher à la française, pour fermer le vide qui, sans cela, existerait entre ces tras, sur le sommier ou le demi-sommier. — De in-clausellum, de clausum.

ENCRENILLÉ, ÉE, RECRENILLÉ, ÉE, adj. — Tortu, crispé, crochu. Une vieille qu’avait le groin tout encrenillé. — On peut y lire crin (crispé comme un crin), mais je le crois plutôt venu de corne : encrenillé pour encornillé. On trouve en effet dans le Forez recornilli au même sens. On dit aussi des arpions encrenillés, ce qui cadre bien avec l’étymologie corne.

ENCUTI, IE. Voy. acuti.

ENDORMIR. — Il ne faut pas s’endormir sur le rôti, Il faut veiller au grain.