Page:Le Littré de la Grand'Côte, éd. 1903.pdf/130

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

CROQ, s. m. — Escroc. Croc est la vieille forme lyonnaise, signalée par Molard, et depuis lors tombée en désuétude. Nous ne disons plus guère : C’est un croc ; malheureusement, il y en a plus que jamais.

CROCHET, s. m. — 1. Instrument pour peser. C’est proprement une romaine. L’instrument étant muni d’un crochet pour y suspendre l’objet à peser, la partie a donné le nom au tout. Du temps de nos grand’mères, il n’y avait pas un ménage où il n’y eût un crochet, à seul fin d’éviter d’être refait au même par le marchand.

2. Os au-dessus du creux de l’estomac. Nous l’appelons crochet, parce que tout le monde sait qu’il fait le crochet et que c’est à cet os qu’est appondu le gigier ou estomac. Aussi rien de si mauvais que de se décrocher l’estomac. C’est des fois de misère, des fois une forçure, mais c’est très mauvais. Les médecins n’y entendent rien, mais M. Chrétien avait de remèdes pour le recrocheter, notamment « le remède que nous portons tous avec nous ».

3. Organe de la Jacquard. Les crochets sont des aiguilles verticales recourbées aux deux extrémités. Le croc inférieur supporte le collet (voy. ce mot). Le mouvement de la mécanique enlève le crochet par son croc supérieur ; et le crochet, par son croc inférieur, enlève le collet et les branches d’arcades (voy. ce mot) qui y sont appendues. Il y a aujourd’hui des mécaniques jusqu’en 1100 crochets et peut-être plus.

4. Harnais du métier de canut. C’est une règle de bois, aussi longue que la chaine est large, munie de crochets d’un côté et à laquelle sont attachées des cordes qu’on nomme cordes à encorder. Lorsqu’une pièce touche à sa fin, et que le compasteur quitte le rouleau de derrière, on accroche les crochets au compasteur en les faisant passer entre les fils et on enroule les cordes sur le rouleau de derrière. Les cordes, en se déroulant, permettent de conduire le compasteur jusque derrière le remisse, et de ne rien perdre de la chaine.

CROIRE. — S’en croire. Être vaniteux, s’imaginer qu’on est le premier moutardier du pape ; on dit aujourd’hui à l’Académie « se gober ». Je connaissais un brave infirmier dans un hospice, qui était chargé, parlant par respect, de faire chauffer les lavements. Comme il était soigneux et intelligent, il fut appelé à la fonction supérieure de les donner. Ainsi que le faisait judicieusement remarquer un de ses collègues, ce n’était pas une raison pour son épouse de s’en croire tant comme elle s’en croyait.

Ce n’est pas de croire, Ce n’est pas croyable.

Faut croire. Formule d’assentiment très usitée. Chavasse est-i venu ? — Non, — Manquablement il aura reçu une pièce. — Faut croire.

CROISSANT, s. m. — 1. Faucille de moissonneur.

2. Serpe emmanchée à un long bâton pour élaguer les arbres. — De la forme en croissant de lune.

3. Crochet en cuivre placé horizontalement de chaque côté d’un intérieur de cheminée pour retenir la pelle et les pinces. — De la forme, qu’avec de la bonne volonté, on peut comparer à un croissant exagéré.

CROIX. — C’est un usage pieux, conservé dans les vieilles familles, lorsqu’on entame un pain, de tracer une croix dessus avec le couteau.

Faire la croix dessus. 1. En finir avec une chose. Eh ben, père Fenassu, c’est-t-i vrai, ça qu’on dit, que vous courez toujours ? — Oh, y a beau temps que j’ai fait la croix dessus.

2. Se résigner à une perte. Et vos Lyon-et-Loire ? — Oh, je n’y pense plus, j’ai fait la croix dessus.

Ayez soin, quand vous serez à table, de ne pas mettre en croix deux couteaux ou bien votre couteau et votre fourchette. Cela porte infailliblement malheur. Il m’est arrivé de chagriner ainsi, faute d’attention, beaucoup de bonnes gens.

CROIX-DE-MALTE, s. f. — Lychnis chalcedonica, plante à fleurs d’un rouge éclatant, à pétales opposés, de manière à paraitre figurer une croix de Malte.

CROIX-PILE. — Se mettre à croix-pile, Se coucher à bouchon les bras et les jambes écartés. On est à pile, puisque le revers de la médaille est en l’air, et en même temps l’on est à croix, puisqu’on en a pris la forme. C’est très champêtre, dans un pré, pour faire son quart d’heure.

CROMPIRE, s. f. — Pomme de terre. — All. grundbirn ; holland. grondpeer. Introduit lors de l’invasion de 1815.