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COUYON, s. m. — Benoît, mollasse, couâme, cogne-v…, etc. Ce mot n’a absolument rien chez nous du caractère déshonnête qu’on attribue, perait-il, au français coïon.

Un couyon de la lune, même sens. — Chacun sait que les femmes ont en partie toutes un quartier de lune dans la tête, sans compter les pêcheurs de lune, illustrés depuis peu par E. Rostand. Il résulte de toutes ces acceptions qu’on reporte à la lune l’influence de rêvasserie qu’on retrouve dans l’expression Il est toujours dans la lune pour désigner quelqu’un qui pense toujours à autre chose que ce dont il doit s’occuper dans le moment.

Quand je revins de nourrice, j’avais une bonne grosse face large, mais sans flamme. On me mène chez des amis pour me faire faire connaissance avec leur petite fille âgée de deux ou trois ans de plus que moi et qui béguait. Je la regardais intimidé. — Comment que tu le trouves, fit mon père ? — Je trou… trou… ve qu’il a l’air d’un tou… tou… touyon de la lune !

COUYONNADE, s. f. — 1. Gandoise.

2. Niaiserie. Dire des couyonnades, Dire des plaisanteries, des niaiseries. Ne s’entend nullement de dire des choses déshonnêtes.

Couyonnade en bâtons, Crème de niaiserie.

COUYONNE. — Mar-chand d’eau dé Couyonne ! C’était sur une mélopée triste et lamentable, que de pauvres traine-grolles, généralement très vieux, criaient ainsi par les rues la vente de l’eau de Cologne dans des fioles très minces, longues comme un crissin de chez Casati, et qu’on ne pouvait tenir autrement que couchées. Dire que de pauvres gens gagnaient ainsi leur pauvre vie, cela semble extraordinaire, car enfin l’eau de Cologne n’est pas une denrée à vente démocratique comme les courles. Il y a beau temps que les bazars ont tué les marchands d’eau dé Couyonne !

COUYONNER, v. n. — Plaisanter, railler, gausser. Vous dites que maintenant on se cause de Paris à Lyon ? Vous couyonnez !

Couyonner le service, Mal s’acquitter d’un office, d’une commission, d’un devoir. Te voilà marié, disait le père Carbouillon à son fils lo soir de ses noces, va pas couyonner le service !

COUZON. — Duel à l’épée de Couzon, Duel à coups de poing.

COUZONNAIRE, AISE. — Habitant, ante de Couzon. À Lyon, on appelle plus spécialement Couzonnaires les mariniers qui apportent la pierre de Couzon, dont tout Lyon est bati.

COVIN, s. m. — Piquette, second vin. — Cum vino.

COYAU, s. m. — Morceau de bois rapporté sur l’extrémité inférieure du chevron dans les toitures à forte pente et qui les fait se terminer agréablement par une courbe concave. On trouve déjà coiau au xive siècle. — De cauda, queue.

CRABOUILLER, ÉCRABOUILLER, v. a. — Écraser, réduire en capilotade. Quand mon grand-père était petit, mon arrière-grand-père, donc le passementier de la rue de l’Hôpital, l’envoya une fois acheter un quarteron d’abricots, bien mûrs. Mon grand-père, n’ayant pas de panier (ni de gilet), ouvre sa chemise à l’estomac, met les abricots dedans. Les abricots, par leur poids, petit à petit, tirent la chemise, la font passer par-dessus la ceinture, et les abricots dans le ruisseau. Mon grand-père veut les ramasser, il glisse, pouf ! et le voilà à plat ventre sur ses abricots, nageant à la grenouille. Si les abricots furent écrabouillés ! — Le petit gone fut obligé de les manger sur place. — Aussi mon grand-père, dans sa vieillesse, recommandait-il à ses petits-enfants de ne jamais aller acheter d’abricots sans avoir bien serré la ceinture de leurs culottes. — Vieux franç. escharbouiller, de carbuculare.

CRACHAT. — Se noyer dans son crachat. Se dit de quelqu’un qui se fait des monstres des moindres difficultés. Le grand Ampère écrivait : « L’état de mon esprit est singulier ; je suis comme un homme qui se noierait dans son crachat, et qui chercherait inutilement une branche pour s’accrocher. » — J’ai remarqué que, de tous les défauts, c’est celui sur lequel la volonté a le moins de prise.

CRACHÉ. — C’est son père tout craché. La plupart du monde emploient un autre mot