Page:Le Koran (traduction de Kazimirski).djvu/565

Cette page a été validée par deux contributeurs.
  sur mahomet. xxvii

fense pour offense ; si j’ai ravi à quelqu’un son bien, qu’il le reprenne, qu’on ne craigne pas de s’attirer par là ma haine, la haine n’est pas dans ma nature. » Un individu vint lui réclamer trois dirhems ; Mahomet les lui restitua aussitôt en disant : « Mieux vaut la honte en ce monde que dans l’autre. » Quelques jours après, se sentant trop faible pour quitter le lit, il dit tout à coup aux assistants dans un moment voisin du délire : « Qu’on m’apporte de l’encre et du papier, je vais vous donner un écrit qui vous préservera à jamais de l’erreur. » Mais Omar empêcha qu’on n’exécutât cet ordre. « Le prophète est en délire, dit-il. N’avons-nous pas le Koran pour nous guider ? » Pendant qu’on disputait s’il fallait se conformer aux ordres d’un moribond, Mahomet dit aux assistants : « Retirez-vous, il ne convient pas de disputer ainsi en présence de l’envoyé de Dieu. » Il reparut, encore une fois dans la Mosquée, avec laquelle sa chambre communiquait, et recommanda cette fois-ci de suivre le Koran comme un guide infaillible au milieu des épreuves qui attendaient les musulmans. Ces conseils furent prononcés d’une voix puissante et sonore qui semblait indiquer un retour de forces ; toutefois, ce ne fut que le dernier éclat d’une lumière qui allait bientôt s’éteindre. Rentré dans son appartement, il demeura pendant quelques heures affaissé après avoir prononcé des mots entrecoupés : « Mon Dieu… oui… avec le compagnon d’en haut (l’ange Gabriel). » Il expira sur les genoux d’Aïcha, le 13 rabi, 1er de l’année 11 de l’hégire (le 8 juin, 632 de J.-C.), qui était un lundi. Son tombeau est donc à Médine, qui a reçu à cause de cela l’épithète de monewwereh, l’illuminée. La nouvelle de sa mort se répandit bientôt à Médine et y jeta une consternation générale ; les uns ne voulaient pas y croire, d’autres étaient déjà disposés à retourner à l’idolâtrie ; mais la résolution d’Aboubekr survenue promptement étouffa le désordre en germe et fixa pour toujours les destinées de l’islam. On voit par ce qu’on vient de dire que Mahomet n’avait désigné aucun successeur[1]. À l’époque de sa mort il ne laissa aucun enfant mâle ; il épousa en tout quinze femmes, et eut commerce avec douze d’entre elles. À l’exception de Marie la Copte, d’abord sa concubine, ensuite sa femme, dont il eut un fils, Ibrahim, qui mourut avant lui ; il eut tous les autres enfants de Khadidja, sa première femme, ce furent les quatre garçons Kacim, Taiib, Tahir, Abdallah, et quatre filles : Fatima, mariée à Ali, Rokaïa et Omm Kolthoum, mariées toutes les deux à Othman, plus tard khalife, ainsi que Zeïnab (Zénobie). Parmi celles de ses


  1. Il serait inutile de discuter ici la valeur des arguments que les chiites produisent en faveur d’Ali, gendre de Mahomet, arguments tirés de plusieurs passages du Koran et de la tradition. Tous ces arguments sont donnés fort longuement dans un exposé de la doctrine chiite intitulé « Hakkoul-yakin » (la vérité certaine), ouvrage persan composé vers 1696 de notre ère, par Mohammed-Bakir, fils de Mohammed-Taki, et imprimé à Ispahan.