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xxvi notice biographique  

pèlerinage d’adieu. Mahomet avait fait pressentir dans son allocution du mont Arafat qu’il ne lui serait peut-être pas donné de revoir la Mecque. Effectivement, peu de temps après son retour à Médine, il tomba malade. Cette indisposition, bien qu’elle affaiblît ses forces physiques, n’altéra en rien ses facultés intellectuelles ; il conçut le projet d’une nouvelle expédition contre les provinces romaines, et désigna même le chef des troupes Ouçama, fils de son affranchi Zeïd, qui devait conduire cette expédition. Vers cette époque un orage surgissait dans l’Arabie même. Trois hommes se déclarèrent en même temps dans trois différentes provinces, prophètes des Arabes, l’un était Tolaïka, dans le Nedjd, l’autre Moçaïlama, dans l’Yémama, et le troisième Aïhala, nommé aussi el-Aswad (le noir) de la tribu d’Ans (el-Ansi), dans l’Yémen. Ces prophètes, qui ne pouvaient être regardés par les musulmans que comme de faux prophètes, avaient déjà fait quelques progrès parmi les tribus nouvellement converties, mais éloignées de Médine ; et Moçaïlama adressa même à Mahomet une lettre dans laquelle il lui proposait de partager avec lui le pouvoir, tous deux étant également prophètes et envoyés de Dieu. Mahomet répondit à ce message par ces mots : « Mohammed, envoyé de Dieu, à Moçaïlama l’imposteur. Salut à ceux qui suivent la voie droite[1]. La terre appartient à Dieu, il en donne la possession à qui il lui plaît. Ceux là seuls prospèrent qui craignent le Seigneur. » Les termes de cette réponse faisaient entendre que Mahomet allait remettre au sort des armes de décider à qui devait appartenir le pouvoir ; en attendant il envoya des ordres à ses généraux pour contenir les progrès des imposteurs ; mais il ne connut que la défaite d’Elaswad, assassine par un de ses propres lieutenants ; car la fièvre qui l’avait quitté revint au bout de peu de temps, et affaiblit bientôt toutes ses forces. Se sentant de plus en plus mal, il s’installa dans le logement d’Aïcha, sa femme, et donna des instructions très-précises sur la manière dont il voulait être enterré.

« Quand vous m’aurez lavé et enseveli, disait-il à ses parents, vous me poserez sur ce lit au bord de ma tombe, qui sera creusée dans cette chambre même, à la place où je suis, puis vous me laisserez seul et vous attendrez que l’ange Gabriel et tous les anges du ciel aient prié sur moi, vous rentrerez ensuite pour prier sur moi, d’abord ma famille et ensuite tous les musulmans. » Malgré sa faiblesse extrême, il se rendit encore, s’appuyant sur ses deux cousins, à la Mosquée, et là, monté sur la chaire (minber), il fit aux musulmans l’allocution suivante : « Ô musulmans, si j’ai frappé quelqu’un d’entre vous, voici mon dos, qu’il me frappe ; si quelqu’un a été offensé par moi, qu’il me rende of-


  1. Il est à remarquer que les princes musulmans commencent par cette formule de salut les lettres qu’ils adressent aux princes non musulmans.