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  CHAPITRE II. 11
  1. Et nous les fîmes servir d’exemple terrible à leurs contemporains, à leurs descendants, et d’avertissement à tous ceux qui craignent.
  2. Souvenez-vous du jour où Moïse dit à son peuple : Dieu vous ordonne d’immoler une vache ; les Israélites s’écrièrent : Est-ce que tu te moques de nous[1] - Que Dieu me préserve, dit-il, d’être du nombre des insensés ! — Prie ton Seigneur, répondirent les Israélites, de nous expliquer clairement quelle doit être cette vache. — Dieu veut, dit-il, que ce ne soit ni une vache vieille ni une génisse, mais qu’elle soit d’un âge moyen. Faites donc ce qui vous est ordonné.
  3. Les Israélites ajoutèrent : Prie ton Seigneur de nous expliquer clairement quelle doit être sa couleur - Dieu veut, leur dit Moïse, qu’elle soit d’un jaune très prononcé, d’une couleur qui réjouisse l’œil de quiconque la verra.
  4. Prie ton Seigneur de nous expliquer clairement quelle doit être cette vache, car nous trouvons bien des vaches qui se ressemblent, et nous ne serons bien dirigés dans notre choix que si Dieu le veut.
  5. - Dieu vous dit, reprit Moïse, que ce ne soit pas une vache fatiguée par le labourage ou l’arrosement des champs, mais une vache dont le mâle n’aura jamais approché ; qu’elle soit sans aucune tache. — Maintenant, dit le peuple, tu nous as dit la vérité. — Ils immolèrent la vache, et cependant peu s’en fallut qu’ils ne l’eussent point fait.
  6. Rappelez-vous ce meurtre qui a été commis sur un homme d’entre vous ; ce meurtre était l’objet de vos disputes. Dieu fit voir au grand jour ce que vous cachiez[2].

  1. Les Juifs demandaient à Moïse de découvrir un meurtrier (voyez plus bas, verset 67). Comme moyen d’y parvenir, Moïse ordonna d’immoler une vache ce qui en apparence n’avait aucun rapport avec le meurtre.
  2. Moïse avait établi le sacrifice de la vache et l’emploi de ses cendres comme expiation et purification d’un homme qui aurait touché un cadavre. Voy. les Nombres, Chap ; iX. L’auteur du Koran, puisant on ne sait à quelles sources, refait l’histoire de cette disposition de Moïse à sa manière. Voici, d’après tes commentateurs du Koran, le récit qui sert de base aux versets 63-69 : Un homme pieux parmi les Israélites avait une génisse et un enfant mâle ; il conduisit sa génisse dans le désert et l’abandonna à la sauvegarde de Dieu jusqu’à l’époque où son fils deviendrait majeur. Peu de temps après, l’homme pieux mourut, laissant son fils avec sa mère. La mère du jeune homme, se trouvant quelques années après dans la gêne, l’envoya à la recherche de la vache, unique bien qui leur restât. La vache, jusqu’alors sauvage et ne se laissant saisir par personne, suivit sans résistance le jeune homme. Celui-ci, conformément au désir de sa mère, conduisit la vache au marché pour la vendre et en retirer quelque argent. Un inconnu, c’était l’ange de Dieu, offrit d’abord six, puis douze dinars au jeune homme, à condition de ne point consulter la mère sur la valeur du marché. Le jeune homme cependant raconta la chose à sa mère, qui, de son côté, croyant voir dans l’insistance de l’inconnu une intervention du ciel, recommanda à son fils de retourner au marché, et de consulter l’inconnu, qui ne manquerait pas de se présenter de nouveau, sur le meilleur emploi à faire de la vache. Alors l’ange révéla au jeune homme qu’il devait garder sa vache, car avant peu un événement qui arriverait chez les Juifs lui fournirait l’occasion de la vendre pour la quantité d’or que pourrait contenir sa peau. En effet, quelque temps après, un riche Israélite, nommé Hamiel, fut tué par un de ses parents qui convoitait sa femme ou ses richesses. L’auteur du crime était inconnu, et des hommes innocents furent inquiétés par des accusations injustes. Pour lever le doute et tirer les Juifs de la perplexité où ils étaient, Dieu ordonna à Moïse de chercher une vache ayant tous les signes indiqués par la révélation, de l’égorger, et de frapper le cadavre de Hamiel avec l’un de ses membres. Le cadavre frappé ainsi se leva, révéla le nom de son meurtrier, et mourut une seconde fois. Pour obtenir la vache en question, les Juifs durent, quoique à contre-cœur, donner au jeune homme la somme qu’il demandait.