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parties semblables à celles dont elle sont comme les décombres ou les débris. Cette idée de la digestion, reprend-il, étant simple, doit la faire connoître pour naturelle, mais cette idée exclut celle de transmutation, qui doit, si on en croit le vulgaire, s’introduire dans le chyle par la digestion, comme si les alimens, en changeant de consistance, devoient changer de nature. Cette metamorphose deviendroit cependant inutile & dangereuse, parce qu’elle ôteroit aux alimens la plus essentielle de leurs proprietez, c’est-à-dire, cette convenance qu’ils tiennent des animaux ou des plantes, & qui les rend capables de nourrir nos corps. La possibilité de cette transmutation paroît donc aussi peu solidement établie que celle des métaux. »

Voilà comme M. Hecquet s’explique sur la digestion & sur la nutrition. Les alimens, selon luy, ne quittent point leur nature en nourrissant les animaux, ils ne changent point de caractere ; ils demeurent réellement ce qu’ils étoient, & ils ne font que changer de consistance, en sorte que l’herbe que broutent les moutons & les bœufs ne fait que prendre une autre apparence, & conserve toujours, en entrant dans la composition du corps de ces animaux, le même caractere qu’elle avoit auparavant. Nous laissons aux Lecteurs à faire là-dessus leurs reflexions, & par rapport à la Physique, & par rapport à la Loy de l’Eglise, dans ce qui concerne l’abstinence ordonnée en Carême. Mais ce seroit manquer à la fidélité d’un Extrait, de ne pas rassembler ici les trois propositions suivantes, qui sont de notre Auteur ; l’une, que la viande renferme des soulfres d’une malignité si grande, qu’il n’y a rien qu’on ne pût dire sur ce sujet contre l’usage de la viande, l’autre, que les alimens (comme nous venons de voir) ne changent point de caractere & de nature, en se convertissant en chyle, en sang, & en nourrissant les parties du corps ; la troisiéme, que le chyle & le sang ne renferment néanmoins ni sels, ni soulfres, soit en santé, soit en maladie.

Nous ne sçaurions suivre l’Auteur plus avant sans nous trop étendre, cet échantillon peut suffire pour donner l’idée qu’on doit avoir de ses raisonnemens. Au reste, nous devons cette