Page:Le Grand Meaulnes.djvu/31

Cette page a été validée par deux contributeurs.

À la question de M. Seurel, une dizaine de voix répondirent, criant ensemble :

— Le grand Meaulnes ! le grand Meaulnes !

Mais M. Seurel fit semblant de ne pas entendre.

Alors ils crièrent :

— Fromentin !

D’autres :

— Jasmin Delouche !

Le plus jeune des Roy, qui allait aux champs monté sur sa truie lancée au triple galop, criait : « Moi ! Moi ! », d’une voix perçante.

Dutremblay et Mouchebœuf se contentaient de lever timidement la main.

J’aurais voulu que ce fût Meaulnes. Ce petit voyage en voiture à âne serait devenu un événement plus important. Il le désirait aussi, mais il affectait de se taire dédaigneusement. Tous les grands élèves s’étaient assis comme lui sur la table, à revers, les pieds sur le banc, ainsi que nous faisions dans les moments de grand répit et de réjouissance. Coffin, sa blouse relevée et roulée autour de la ceinture, embrassait la colonne de fer qui soutenait la poutre de la classe et commençait de grimper en signe d’allégresse. Mais M. Seurel refroidit tout le monde en disant :

— Allons ! Ce sera Mouchebœuf.

Et chacun regagna sa place en silence.


À quatre heures, dans la grande cour glacée, ravinée par la pluie, je me trouvai seul avec