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récompenses distribuées, tout attendait l’automne, la rentrée d’octobre et le nouvel effort — je pensais de même que notre jeunesse était finie et le bonheur manqué ; moi aussi j’attendais la rentrée aux Sablonnières et le retour d’Augustin qui peut-être ne reviendrait jamais…

Il y avait cependant une nouvelle heureuse que j’annonçai à Millie, lorsqu’elle se décida à m’interroger sur la nouvelle mariée. Je redoutais ses questions, sa façon à la fois très innocente et très maligne de vous plonger soudain dans l’embarras, en mettant le doigt sur votre pensée la plus secrète. Je coupai court à tout en annonçant que la jeune femme de mon ami Meaulnes serait mère au mois d’octobre.

À part moi, je me rappelai le jour où Yvonne de Galais m’avait fait comprendre cette grande nouvelle. Il y avait eu un silence ; de ma part, un léger embarras de jeune homme. Et j’avais dit tout de suite, inconsidérément, pour le dissiper — songeant trop tard à tout le drame que je remuais ainsi :

— Vous devez être bien heureuse ?

Mais elle, sans arrière-pensée, sans regret, ni remords, ni rancune, elle avait répondu avec un beau sourire de bonheur :

— Oui, bien heureuse.


Durant cette dernière semaine des vacances, qui est en général la plus belle et la plus roman-