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» Elle ne nous a pas oubliés ; elle est couturière à Paris auprès de Notre-Dame ; elle nous écrit encore pour nous demander si nous ne savons rien des Sablonnières. Une bonne fois, pour la délivrer de cette idée, je lui ai répondu que le domaine était vendu, abattu, le jeune homme disparu pour toujours et la jeune fille mariée. Tout cela doit être vrai, je pense. Depuis ce temps ma Valentine écrit bien moins souvent…


Ce n’était pas une histoire de revenants que racontait la tante Moinel de sa petite voix stridente si bien faite pour les raconter. J’étais cependant au comble du malaise. C’est que nous avions juré à Frantz le bohémien de le servir comme des frères et voici que l’occasion m’en était donnée…

Or, était-ce le moment de gâter la joie que j’allais porter à Meaulnes le lendemain matin, et de lui dire ce que je venais d’apprendre ? À quoi bon le lancer dans une entreprise mille fois impossible ? Nous avions en effet l’adresse de la jeune fille ; mais où chercher le bohémien qui courait le monde ?… Laissons les fous avec les fous, pensai-je. Delouche et Boujardon n’avaient pas tort. Que de mal nous a fait ce Frantz romanesque ! Et je résolus de ne rien dire tant que je n’aurais pas vu mariés Augustin Meaulnes et Mlle de Galais.

Cette résolution prise, il me restait encore