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emporté dans les bateaux, ce qui était fort peu de saison, mais les enfants en avaient décidé ainsi, sans doute ; et l’on repartit. Meaulnes s’approcha de Mlle de Galais, dès qu’il la vit sortir et, répondant à ce qu’elle avait dit tout à l’heure :

— Le nom que je vous donnais était plus beau, dit-il.

— Comment ? Quel était ce nom ? fit-elle, toujours avec la même gravité.

Mais il eut peur d’avoir dit une sottise et ne répondit rien.

— Mon nom à moi est Augustin Meaulnes, continua-t-il, et je suis étudiant.

— Oh ! vous étudiez ? dit-elle. Et ils parlèrent un instant encore. Ils parlèrent lentement, avec bonheur, — avec amitié. Puis l’attitude de la jeune fille changea. Moins hautaine et moins grave, maintenant, elle parut aussi plus inquiète. On eût dit qu’elle redoutait ce que Meaulnes allait dire et s’en effarouchait à l’avance. Elle était auprès de lui toute frémissante, comme une hirondelle un instant posée à terre et qui déjà tremble du désir de reprendre son vol.

— À quoi bon ? À quoi bon ? répondait-elle doucement aux projets que faisait Meaulnes.

Mais lorsque enfin il osa lui demander la permission de revenir un jour vers ce beau domaine :

— Je vous attendrai, répondit-elle simplement.

Ils arrivaient en vue de l’embarcadère. Elle s’arrêta soudain et dit pensivement :

— Nous sommes deux enfants ; nous avons fait