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Il lui parlait avec gaucherie, mais d’un ton si troublé, si plein de désarroi, qu’elle marcha plus lentement et l’écouta.

— Je ne sais même pas qui vous êtes, dit-elle enfin.

Elle prononçait chaque mot d’un ton uniforme, en appuyant de la même façon sur chacun, mais en disant plus doucement le dernier… Ensuite elle reprenait son visage immobile, sa bouche un peu mordue, et ses yeux bleus regardaient fixement au loin.

— Je ne sais pas non plus votre nom, répondit Meaulnes.

Ils suivaient maintenant un chemin découvert, et l’on voyait à quelque distance les invités se presser autour d’une maison isolée dans la pleine campagne.

— Voici la « maison de Frantz », dit la jeune fille ; il faut que je vous quitte…

Elle hésita, le regarda un instant en souriant et dit :

— Mon nom ?… Je suis Mademoiselle Yvonne de Galais…

Et elle s’échappa.


La « maison de Frantz » était alors inhabitée. Mais Meaulnes la trouva envahie jusqu’aux greniers par la foule des invités. Il n’eut guère le loisir d’ailleurs d’examiner le lieu où il se trouvait : on déjeuna en hâte d’un repas froid