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au Catalogue des Evesques de S. Malo, et en son Histoire, liv. 4, chap 63 Fasciculus, Historia. Ord. Cirtenciens. Sirmundus és annot. sur la 15. Epistre du liv. premier des Epistres de Pierre Abbé de Celtes ; Jean Picard, és annot. sur la 359. Epistre de S. Bernard ; Jean Chenu, en son Histoire Chronologique des Eveschez de France, en ceux de S. Malo ; Jean Robert, en sa France Chrestienne, lettre M.R.P. Augustin Du Pas, en son Histoire genealog. des Illustres Maisons de Bretagne, en la Genealogie de Pontièvre, pag. 10 et 11, et au rôlle des Evesques de S. Malo.


LA VIE DE S. RIOK,


Anachorete et Confesseur, le 12 de Fevrier.


Les Genereux Chevaliers Neventerius & Derien, Seigneurs Bretons Insulaires, ayans fait le voyage de la terre Sainte, où ils avoient esté bien recueillis de Ste Heleine, mère du pieux Empereur Constantin le Grand, se mirent sur le retour, &, ayans navigué dans la Mediterranée, entrèrent par le détroit de Gibraltar dans l’Occean, puis, rengeans la coste d’Espagne, vinrent prendre port à Vennes, d’où ils allèrent à pied à Nantes en pelerinage visiter les reliques de S. Pierre & des saints Martyrs Similian[1], Donatian & Rogatian car les Edits de l’Empereur Constantin avoient déjà esté publiez, sous la faveur desquels, les Nantois avoient edifié une mediocre Église dans l’enclos de leur Ville, où on alloit en devotion & pelerinage de tous les cantons de Bretagne. Arrivez à Nantes, ils feurent fort bien receus, tant du Lieutenant de l’Empereur, que de l’Evesque du lieu qui les oüit en Confession, leur administra les Sacremens & leur fournit des chevaux & convoy à eux & à leur train, pour les conduire en seureté à Brest, où leurs Navires les estoient allez attendre.

II. Comme ils alloient par païs, passant le long de la riviere Dour-donn, entre Pont-Christ[2] et le Chasteau de la Roche-Maurice, demie lieuë de la ville de Landerneau, ils apperceurent le Seigneur de ce Chasteau (qui s’appelloit Elorn) lequel, des creneaux & guerites de la muraille, se precipita dans la riviere qui lors couloit tout au pied de ladite place ; &, délors cette riviere, perdant son ancien nom de Dour-donn, fut appelée Elorn, ce pauvre Seigneur luy ayant causé par son desespoir ce nom, comme jadis Icarus donna le sien à la Mer d’Icarie par sa présomption. Nos deux Chevaliers coururent à toute bride à travers la riviere &, l’ayant pris, le tirèrent hors de l’eau, quelque peu blessé ; porté qu’il fut dans sa maison, Neventerius s’enquist de luy pourquoy il s’estoit ainsi jetté dans la riviere Messieurs (dit-il), il y a icy prés un épouventable Dragon qui dévore hommes & bêtes ; & dés que la faim le fait sortir de sa taniere, il fait un degast & dommage irreparable par ce païs, dévorant hommes & bêtes indifferemment pour à quoy obvier, le Roy Bristokus a fait un Edit, que, tous les Samedis, on jettât le sort, & celuy sur qui il tomberoit seroit obligé d’envoyer un homme pour estre dévoré de cette cruelle bête, ou y aller luy-mesme. Or, ce sort est si souvent

  1. Nous verrons plus loin que S. Similien n’a pas subi le martyre et nous indiquerons le fait qui a donné lieu à cette confusion d’autant plus étrange qu’Albert Le Grand racontant la vie de ce Saint Evêque de Nantes l’intitule lui-même ; « La Vie de Saint Similian ou Sembin, Confesseur. » — A.-M. T.
  2. On ne saurait trop déplorer la négligence qui a amené la ruine de cette intéressante chapelle. A.-M. T.