DONT LES FESTES
ESCHEENT AU MOIS DE DECEMBRE.
aint Corentin, premier Evesque de Cornoüaille, en la Bretagne Armorique,
nasquit au même Diocese, environ l’an 375, treize ans avant que le tyran
Maxime passast és Gaules, & fut, dès son enfance, instruit par ses parents
en la Religion Chrestienne ; & ayant esté par une grace & protection speciale
de Dieu, preservé pendant les guerres que le Roy Conan Meriadec fit aux garnisons
Romaines, qu’il chassa entierement de Bretagne, il s’adonna tout de bon au service de
Dieu ; &, pour mieux y vacquer, & faire un perpétuel divorce avec le monde, il se retira
en une solitude, dans une forest en la Paroisse de Plou-Vodiern, au pied de la montagne
de S. Cosme, où il bastit an petit Hermitage près d’une fontaine, &, tout joignant un
petit Oratoire ; passant en ce lieu les nuits & les jours en prieres & Oraisons, inconnu
& retiré de toute conversation humaine, mais chery & consolé de Dieu, qui jamais
n’oublie ceux qui, pour son Amour, oublient toutes choses, & fortifié de sa grace contre
les attaques & tentations de ses ennemis, & comblé de ses celestes et divines caresses.
Pour sa nourriture & sustentation en cette solitude, Dieu faisoit an miracle admirable
& continuel ; car, encore qu’il se contentast de quelques morceaux de gros pain, qu’il
mendioit quelques fois ès villages prochains, & quelques herbes & racines sauvages,
que la terre produisoit d’elle-mesme, sans travail ny industrie humaine, Dieu luy envoya
un petit poisson en sa fontaine, lequel, tous les matins, se presentoit au Saint, qui le
prenoit & en coupoit une piece pour sa pitance & le rejetoit dans l’eau, &, tout à
l’instant, il se trouvoit tout entier, sans lesion ny blesseure, & ne manquoit, tous les
matins, à se presenter à S. Corentin, qui faisoit toujours de mesme.
II. En mesme temps, vivoit un saint Prestre solitaire, nommé Primael, ou Primel, lequel menoit une vie fort sainte dans une forest en Cornoüaille[1]. S. Corentin l’alla
- ↑ En voyant saint Corentin vivre en ermite dans la forêt de Névet, et aller faire visite à un autre solitaire plusieurs ont supposé que leurs ermitages étaient voisins ; c’est une erreur. M. d Kerdanet a très bien désigné le lieu sanctifié par saint Primel ; il est marqué par une chapelle aujourd’hui en ruines, dans la paroisse de Saint-Thois, non loin de la route de Quimper à Châteauneuf, sur un des points les plus pittoresques de cette contrée accidentée.