Page:Le Grand Albert - La Vie des Saints.djvu/615

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

magnifique tribune de l’orgue compose de trente panneaux flamboyants, d’une richesse et d’une finesse extrêmes ; puis le buffet d’orgue, dans le style Louis XIV ; le petit baldaquin octogonal surmontant les fonts baptismaux et datant de 1660 ; une vieille descente de croix dans une niche au bas-côté nord, de nombreux enfeux, une grande quantité de statues et de tableaux, dont deux de Valentin, puis les sculptures des poutres, des sablières et des clefs pendantes de la voûte.


LA VIE DE SAINT WINOKH,


Prince breton, Abbé de Wormholt, en Flandres, Confesseur, le 6. Novembre.


Juhael, sixième en ordre des Roys de Bretagne Dononée, eut de la Reyne Pritelle, sa femme, quinze enfans masles & six filles, lesquels ces Princes éleverent si soigneusement en la crainte de Dieu, que plusieurs d’iceux ont esté canonizez aprés leur mort & reconnus de l’Eglise comme Saints[1]. Le Prince Judicael, comme aisné, succeda à la couronne & gouverna son royaume quelques années (comme nous dirons en sa vie, le 16. de decembre), jusqu’à ce que, desireux de se retirer du bruit des affaires, il se proposa de se démettre de sa dignité Royale en la personne du Prince S. Josse, son frere, & de se retirer dans le Monastere de S. Méen de Gaël, lequel il avoit fait rebastir & amplifier ; d’y prendre l’habit de Religion & de passer le reste de ses jours au service de Dieu ; il en parla au Prince Josse, lequel fit semblant de le trouver bon & demanda quelque delay pour se preparer à son couronnement ; pendant lequel, il fit secretement ses préparatifs & se déroba de la cour (comme vous verrez en sa vie)[2]. L’evasion de saint Josse étonna le Roy, qui s’adressa à son frere S. Winokh & tascha à luy persuader d’accepter la couronne ; mais luy, plus soigneux d’acquerir le Royaume du Ciel que celuy de la terre, le refusa ; &, voyant que le Roy son frere le pressoit d’y consentir, craignant qu’il ne l’y contraignist, il donna ordre à trois gentils-hommes de sa maison, touchez de mesme desir que luy, de luy tenir des chevaux prests à heure dite ; &, s’étant dérobé de la cour en habit déguisé, il se rendit à eux, & tous quatre ne cesserent de piquer, qu’ils ne se virent rendus au territoire de Terroüenne, sur la frontiere du pays de Flandres.

II. S. Winokh & ses trois compagnons Masdoc, Isenoc & Gadanoc (ainsi s’apelloient-ils), se voyans hots du danger qu’ils apprehendoient, vendirent leurs chevaux & bagages, &, en ayans distribué l’argent aux pauvres, s’habillerent fort pauvrement & allerent trouver S. Bertin, Abbé du Monastere de Sithieu, se jetterent à ses pieds & luy demanderent d’estre receus au nombre de ses Religieux. S. Bertin les receut humainement, & les ayant retenus quelque temps dans le Monastere, les vêtit de l’habit du glorieux Patriarche saint Benoist. Quand ils se virent en cette sainte compagnie, ils s’adonnerent tellement à l’exercice de la vertu, que, l’an revolu, ils passerent à la Profession. Entre les antres (1) (2)

  1. «René Benoist, en la vie de St. Josse, dit qu’ils furent tous saints ; mais Pierre Le Bault, en son Histoire de Bretagne Armorique, les nomme tous et ne qualifie de sainteté que si fils et deux filles, savoir : S. Judicael, S. Josse, S. Iudganokh, notre S. WINOKH. S. Gamel, S. Gladran ; les filles sont Ste Vrelle et Ste Ouénne ; les autres sont Hamael Doetwald, Larguel, Rimas, Idunael, Heblon, Gueman, Hoel (duquel nous avons parlé en la vie de St. Méen, p. 247-48, art. VII, VIII et IX) et Juhael, qui nasquit après la mort de son pere. Les filles sont Bredax, Guen, Leor et une autre. » — A.
  2. Cy-dessous, le 13. decembre, art. II. — A.