Page:Le Grand Albert - La Vie des Saints.djvu/600

Cette page n’a pas encore été corrigée
561
LA VIE DE S. KÉ.

Dans la même église, la statue de saint Guenaël, œuvre du xviie siècle, est la plus belle représentation que j’ai vue de notre saint.

À Plougonvelin, où il est également patron, l’église est dépourvue de tout caractère, mais elle renferme un beau rétable d’autel en partie du style Louis XV ; un bas-relief y représente la rencontre de saint Guenaèl en moine avec le comte Waroch portant chapeau à plume et pourpoint, et chassant avec une arquebuse.

Il avait encore des chapelles à Guiscriff, Poullaouën, Elliant, Coray, Moélan, Penhars, Plonéis, Landivisiau. La chapelle de Coray existe encore.

Saint Guenaël est encore patron de la paroisse de Bolazec et d’une petite chapelle en Pouldergat près Douarnenez ; c’est le lieu où il est le plus honoré et l’on y vient beaucoup en pèlerinage. À Vannes une rue porte son nom et un vitrail moderne le représente à la cathédrale. À Rumengol il figure en costume monastique, entre son père et sa mère, dans un très beau vitrail moderne (œuvre de M. L. Lobin).

Il est étonnant qu’une scène aussi gracieuse que celle de l’appel de saint Guénolé et de la vocation de saint Guenaël n’ait inspiré aucun artiste ; il n’y a peut-être pas dans l’histoire des saints un récit aussi bien fait pour tenter un peintre de talent.



LA VIE DE SAINT KÉ OU KENAN, SURNOMMÉ COLODOC,

Evesque et Confesseur, le 5. Novembre.



Saint Ké, ou Kenan, surnommé Colodoc, nasquit en l’isle de Bretagne, de parens nobles & riches son père s’appelloit Ludun & sa mère Tagu. Il se rendit si accomply en toute sorte de sciences, qu’il fut admis au Sacerdoce, & mesme élevé à la Dignité Episcopale en une des citez de son pays, en laquelle il se fit paroistre le père de ses Diocesains, non seulement les nourrissant du pain de sa doctrine, mais encore du pain matériel, ayant vendu tout son bien pour l’entretien & nourriture des pauvres, lesquels il visitoit paternellement, & leur départoit de grosses aumônes, tant par ses mains, que par le moyen de plusieurs vertueuses personnes dont il se servoit en une si sainte œuvre. Mais, ne se jugeant avoir les épaules assez fortes pour supporter la pesanteur de la Charge Episcopale, il se démit de son Evesché, & passa en la province de Cambrie, résolu de se retirer en quelque Hermitage &, pour ne se tromper en l’élection du genre de vie qu’il projettoit mener, il suplia nostre Seigneur de luy manifester sa sainte volonté.

II. Estant en la ferveur de son Oraison, il luy fut revelé qu’il se munit d’une clochette (à la façon des Hermites de ce temps-là) & marchast jusqu’au lieu nommé Ros-ené, où il édifierait un petit Hermitage & s’y tiendroit jusqu’à ce que Dieu luy eût commandé autrement, & que, pour l’avertir de ce lieu, sa clochette sonneroit d’elle-même, lors qu’il y seroit arrivé. Le Saint obeït humblement & s’adressa à un excellent fondeur, nommé Gildas, lequel n’ayant qu’un petit morceau de métal, S. Ké, par la vertu du signe de la Croix, le multiplia, en sorte qu’il en resta grande quantité audit fondeur, en recompense de sa peine. Ayant cheminé quelques jours, avec quelques autres saints Personnages qui s’estoient adjoints à luy, il se trouva fatigué du chemin, &, pour se délasser & reposer quelque peu, ils se jettèrent sur l’herbe verte, prés d’un bras de mer, nommé