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LA VIE DE SAINT GURVAL,

Con/esseHr~ Evesque d’e~ à présent dit Saint-Malo, le 6. de Juin.

AiNT GURVAL, successeur de saint Malo à l’Evesché d’Aleth, nasquit en la grande Bretagne & fut Condisciple dudit saint Malo en l’Ecolle de l’Abbé saint Brandan (1), sous la maistrise & disciple duquel il fit un grand avancement, non moins en l’étude de la vertu que des bonnes lettres. Tout petit

qu’il estoit, il sembla presager qu’il seroit un jour grand Predicateur de la parole de Dieu, car, à certaine heure du jour, il assembloit ses Condisciples en la Classe &, montant en Chaire, les preschoit, avec tant de ferveur, zèle & capacité, qu’encore que cette action semblast puerile, Dieu opéra par son moyen, & plusieurs de ses Condisciples furent, par ses exhortations, invitez à quitter le monde & se résoudre à vivre dans quelque Monastere. C’estoit chose merveilleuse de voir les rigueurs & aspretez dont il mattoit son corps en cet âge tendre & délicat car, encore qu’il fust pensionnaire seculier dans le Monastère, il assistoit aux veilles nocturnes, à l’Oraison & autres exercices Claustraux & observoit ponctuellement les jeusnes de l’Ordre, encore que le R. P. Abbé, à cause de son bas âge, l’en reprit aucune fois.

II. Ses Pere & Mere estans morts, ses autres parens le retirèrent de ce Monastere, &, le 15. an de son âge, lui délaissèrent le maniement de son bien, lequel il vendit, distribua une grosse somme d’argent aux pauvres & apporta le reste au Monastere de saint Brandan, où il postula l’habit & le receut, au grand contentement du saint Abbé & de ses Religieux, nommément de saint Malo ; lequel, peu de temps après, par permission de son Abbé, se retira en solitude. Gurval, ayant parcouru le temps de sa Probation, fit profession, &, par Obedience de ses Superieurs, prit les Ordres successivement & chanta Messe ; & vivoit en son Monastere avec un si rare exemple de sainteté, que saint Brandan estant démis du gouvernement de son Monastere, tous unanimément éleurent saint Gurval pour Abbé ; &, sans avoir égard à ses excuses, le firent benir par l’Evesque Diocesain, au grand contentement de saint Brandan, qui remercia affectueusement Nostre Seigneur du choix qu’avoient fait ses Religieux d’un si digne Pasteur. III. En cette Prélature, il fist paroistre les Graces que Dieu avoit versé dans son ame, il estoit doüé d’une singuliere prudence pour gouverner ses Religieux ; chery des bons, redouté des méchans, aymé d’un chacun mais encore plus de Dieu, lequel, ne voulant permettre que le flambeau allumé demeurast si long-temps caché sous le muids, le voulut élever sur le chandelier pour illuminer son Église. Car saint Malo, estant allé à Xaintes devers son amy saint Leonce, Evesque de ladite Ville, y tomba en une forte maladie, de laquelle il mourut peu après, &, voyant qu’il tiroit à sa fin, il commença à songer qui il pourroit proposer à son Chapitre qui pût occuper ce Siege, au contentement de son troupeau. Sur cette pensée, Dieu luy revela qu’il leur proposast saint Gurval, Abbé du Monastere de saint Brandan en l’Isle de Bretagne. Saint Malo en fut bien aise, &, ayant communiqué sa revelation à saint Leonce, écrivit à ses Chanoines & aux Habitans de la Cité d’Aleth, les exhortant d’élire pour son successeur l’Abbé Gurval, duquel il connoissoit la sainteté & la prudence, les asseurant que Dieu luy avoit revelé que telle estoit sa volonté.

(t) En Basse-Bretagne ce saint est plus connu sous son autre nom de saint j-fe«we ; dans les litanies de saint Vougay, il est invoqué sous le nom de saint ~OH~K(!<a«r<. – A.-M. T.