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avant dans les âmes que les rouets s’arrêtaient parfois de tourner et que les hommes, regardant devant eux, laissaient leur pipe s’éteindre. Neuf heures tintaient à l’horloge. Le père se levait et disait les prières. Francésa et la servante ramassaient hâtivement les chopines de « flip », étouffaient le feu, tiraient le verrou et montaient se coucher à l’étage dans le même lit-clos.

Le lendemain, le travail reprenait. Francésa rangeait avec méthode ses habits de dimanche, la petite croix et le jaseran d’or, épaves de la fortune ancestrale, et descendait en sabots et en jupon de gros drap.

Mais elle restait toujours jolie. Elle avait des cheveux blonds qui crêpaient aux tempes, des yeux pers, les yeux changeants et tristes de sa mère, une bouche très douce, avec un front volontaire et un menton net et dur qu’elle tenait du vieux Prigent. Elle était de taille moyenne, mais bien prise, droite et la poitrine faite. Ses attaches délicates étonnaient quand on ne savait point sa race, comme aussi sa peau blanche et fine qu’on lui voyait quand elle travaillait à l’air, le cou nu et les manches relevées au-dessus de ses mains un peu rouges.