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l’ombre, au bout de la dune, et elle allait retourner à Morvic quand un bruit de voix l’arrêta.

Le vent venait de la terre et lui portait ces voix, encore que basses, assez distinctes pour qu’elle reconnût dans l’une la voix de Thomassin. Elle tressaillit. L’autre voix, c’était une voix grêle et cassée de vieille femme.

À cet endroit, la dune formait de grandes tranchées parallèles, semblables aux sillons des vagues dans la haute mer, d’où pointaient des griffes de chardons bleus, secs et cassants, qu’elle prit garde de ne point frôler. Elle se glissa le long d’une de ces tranchées dans la direction des voix. Quand elle fut à portée, elle s’arrêta, leva un peu la tête au-dessus des chardons et, dans la nuit, reconnut le douanier et la rebouteuse.

Sa joie fut telle qu’elle ne songea point à s’effrayer du voisinage. Les saints, les saintes, le ciel l’avaient donc exaucée ! Cette preuve, ce miracle qu’elle leur demandait, ils le lui accordaient à l’heure même ; elle l’avait là, sous ses yeux, ou plutôt ils le renouvelaient devant elle, comme au soir de Roscané, pour qu’elle fût plus sûre de la malignité de son ennemi.