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un patron de barque de Trébeurden, acteur ou témoin dans l’événement.

Au dire de ce lointain ancêtre, il avait été trouvé dans le chenal de l’île Milio, sur un navire à la dérive. Il était cloué au grand mât et, tout autour du mât, il y avait des cadavres allongés sur le ventre et qui, dans cette attitude se tenaient encore par la main, comme s’ils avaient été frappés de la foudre tous ensemble au moment où ils menaient autour de l’image cet abominable branle des sept péchés capitaux par lequel la perverse Ahès avait autrefois livré la ville d’Is et son père Grallon… Le navire non plus n’était pas gréé comme ceux du pays ; il portait un nom qu’on n’avait pu déchiffrer, un nom de chez les païens de Turquie, disaient les vieux rouleurs, et qui s’accordait assez bien avec les espèces de turbans dont l’équipage était coiffé. On tenta d’amariner l’épave : peine perdue. La mer s’était faite de plomb, et le gredin de bâtiment avait l’air vissé dessus. Alors, un des pêcheurs eut l’idée de déclouer le crucifix et de le transporter dans sa barque. Et aussitôt la mer se fendit et le navire s’abîma.

Cette légende, renouvelée peut-être ou contemporaine et jumelle de celle du mystérieux