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accroupie dans un coin. Une bise aigre soufflait par les fissures de la porte. Serrée dans son vêtement de misère, immobile, elle se taisait et regardait le foyer. L’ivrogne s’étira, chercha sa soupe. L’ombre s’était épaissie ; mais un reste de clarté coulait encore par les vitres, et il s’aperçut que Coupaïa n’avait pas bougé.

Il bredouilla quelques phrases indistinctes où il s’agissait de soupe et de résine.

— La résine est toute brûlée, répondit Coupaïa.

— Et… et la soupe ? dit l’ivrogne, la voix coupée de hoquets.

— Il n’y a pas de soupe.

— Pa… as de soupe ? Ah !…

Il n’insista pas et se recoucha sur la table. Tant de sérénité finit par indigner Coupaïa. Elle se jeta sur lui, le secoua, lui cria dans la face, comme pour exorciser l’ivresse, et quand elle le tint de ses deux bras, lié à elle, ses yeux dans ses yeux lourds :

— Sais-tu pourquoi il n’y a pas de soupe, maudit que tu es ? C’est parce qu’il n’y a plus de pain pour nous chez le boulanger.

— Plus…us de pain, balbutia l’homme. Et Lo…oïz, as-tu vu Lo…oïz ?