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dont ils négligèrent de renouveler la police d’assurance se perdit au large du Havre avec son chargement de bordures de pierre ; enfin les travaux de l’exploitation cessèrent au bout de la cinquième année, et le débit ne fut plus fréquenté que de loin en loin, par des Lannionnais qui venaient pêcher la crevette à Morvic, aux marées d’équinoxe. Les Salaün essayèrent d’une autre industrie. L’homme avait un demi-frère, Louis ou Loïz Thomassin, douanier à Landrellec, qui possédait trois mauvais champs, près de la mer, à Trégastel, et qui leur en accorda la jouissance gracieuse. Le produit de ces champs et des tourtes de soude qu’ils fabriquaient à Morvic aurait pu leur permettre de vivoter. Mais l’homme ne se corrigea point ; tout son gain passait en eau-de-vie ; les fournisseurs, qui n’étaient point payés, se plaignirent, arrêtèrent leur crédit, menacèrent de l’huissier : un soir, le pain manqua.

Ce soir-là, Salaün était rentré ivre à Morvic. Il ne vit point que le feu était éteint et que la résine n’était pas allumée ; il s’assit à sa place d’habitude, et, la tête couchée sur les bras, il attendit en somnolant que la ménagère lui servît son écuellée de soupe. Coupaïa était