LA MER[1]
C’est le titre de l’anthologie maritime de M. Americo
Bertuccioli et, s’il y a une chose qui étonne,
c’est que ce livre soit le premier en date de son
espèce. Mais le fait est qu’avant M. Bertuccioli et en
un temps où tout est prétexte à anthologies, chrestomathies,
miscellanées, spicilèges et florilèges, personne
n’avait encore songé à recueillir les plus belles
pages écrites sur la mer par des écrivains français.
Et, quand un auteur y songe d’aventure, cet auteur
est un Italien et son livre paraît à Milan. D’où l’on
serait tenté d’inférer que les choses n’ont point
changé en France depuis le maréchal de Vielleville
qui disait qu’on aurait beau s’évertuer, rien n’y
ferait et que ce n’est pas le fait des Français que la
marine, mais un bon cheval, une jolie fille et un
mousqueton.
Entre le maréchal et nous il y a eu pourtant Richelieu, Colbert, Sartines, Castries — et tout le romantisme. À deux périodes de son histoire, sous Louis XIV jusqu’à la Hogue, sous Louis XVI jusqu’aux Saintes, la France tient nettement en échec la Hollande, les Impériaux et l’Angleterre et, même après ces défaites, compensées d’ailleurs par des rencon-
- ↑ Préface aux deux livres de M. Americo Bertuccioli, professeur à l’Académie navale italienne : la Mer et la Grande Bleue, recueils de morceaux choisis français sur la mer et la marine, Milan, Fratelli Trêves, édit.