Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/178

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Maurice presque à son arrivée au Val et il en fait honneur surtout à l’heureuse influence d’Hippolyte et de sa femme : autant qu’à l’amitié, cet équilibre ne fut-il pas dû au spectacle de la mer bretonne et à l’espèce de vertu organisatrice que Guérin lui attribuait ?

« Là se sont tus durant quelques heures, écrit-il, tous ces bruits intérieurs qui ne se sont jamais bien calmés depuis que la première tempête s’est élevée dans mon sein. Là, toutes les mélancolies douces et célestes sont entrées en troupe dans mon âme avec les accords de l’Océan, et mon âme a erré comme dans un paradis de rêveries. »

Un paradis ! Que nous sommes loin de la géhenne marine des romantiques, de la mer aux « lugubres histoires » du vieil Hugo !… Pour visiter cette baie admirable de l’Arguenon, le meilleur guide est encore Guérin. La plaie du « balnéisme » a épargné le paysage : rares sont les villas rococo qui troublent ses lignes simples et graves. La grande route de Dinard à Saint-Cast franchit bien maintenant l’Arguenon sur un viaduc en fer de cinq travées. Ce viaduc, postérieur au séjour de Guérin, n’a qu’une excuse, c’est qu’il fait belvédère et qu’on peut capter de là toute la baie : la mer et les îles au fond ; à gauche, la tour croulante du Guildo, drapée de lierre comme un hidalgo dans sa cape ; à droite, sur la grève, le chaotique amas des Pierres-Sonnantes, blocs d’amphibole qui rendent sous le pied un tintement argentin ; plus loin l’entrée, à demi masquée par les lianes, de cette Grotte-de-la-Fée décrite dans le Cahier Vert et qui fut l’original de la grotte du Centaure ; sur la hauteur enfin, émergeant des taillis, le manoir du Val, dont les allées, le « petit bois », les bosquets de roses se souviennent peut-être du