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avait été attirée, qu’on se soit emparé de Marguerite Charlès.

Quoiqu’il en soit et quand la Charlès et les Rannou eurent été « branchés », la paix ne régna pas pour cela sur la Lieue-de-Grève ; les fourrés et les landes continuèrent de servir de repaire aux voleurs de grand chemin. L’audace de ces malandrins alla même grandissant. On raconte qu’au commencement du xixe siècle les voyageurs, presque au sortir du bourg de Saint-Michel, apercevaient sur la route une casquette pendue à un bâton ; près du Roc’h-Allaz, une autre casquette et un autre bâton ; au pied de la montée de Saint-Efflam enfin, une troisième casquette pendue à un troisième bâton. S’ils ignoraient ou faisaient semblant d’ignorer la signification de ces trois casquettes et de ces trois bâtons, il y avait de grandes chances pour qu’ils n’atteignissent pas Plestin sans avoir fait connaissance avec l’escopette des bandits.

Il leur échéait pis encore quelquefois : un de mes grands-oncles, officier de santé, qui se rendait à Morlaix par la Lieue-de-Grève, à cheval, son porte-manteau en croupe, qui contenait 5 ou 6.000 francs, fut trouvé au matin couché sur le dos, un énorme rocher sur la poitrine, sa sacoche vide et ses pistolets près de lui, qu’il avait déchargés sur les brigands. Lui aussi sans doute avait passé près des trois casquettes sans y déposer la rançon dont ces coquins frappaient tous voyageurs, à l’exception « des nones, des prêtres et des ménétriers »…