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de mairie, y fait les annonces « sous la croix », à l’issue de la grand’messe. Un tel lieu n’a rien de lugubre et, si les pensées qu’il éveille prennent naturellement un tour grave, ces pensées ne sont pas nécessairement mélancoliques.

Garmès cependant parut frappé du hasard qui donnait pour cadre à leur dernier entretien ce cimetière de village. Il avait perdu tout espoir de réduire Guyomar. De la tombe où ils étaient assis on apercevait un coin de place devant l’auberge du Soleil d’or : le tilbury du docteur était rangé là, les brancards en l’air ; Larose lui-même ne devait pas se tenir bien loin. Guyomar avait reconnu la voiture et il revoyait sans doute, en esprit, l’homme qui parlait six mois plus tôt de le déférer aux assises et dont l’abandon lui avait été plus sensible que toutes les accusations de M. d’Aurelles. Pardonner à cet homme, décidément non, jamais !

— Jamais ? dit Garmès. C’est ton dernier mot ?

— Mon premier et mon dernier.

— Écoute, Yves-Marie, dit alors Garmès. Ce n’est pas un simple hasard qui a voulu que nous ayons cette conversation dans le cimetière. On peut te parler comme à un homme. Sache donc que ta place est marquée ici et que tu n’as plus longtemps à attendre pour l’occuper. Cela me brise le cœur de te parler ainsi, mais il faut que tu te rendes compte de ton état.

Si maître qu’il fût de lui, Guyomar, en entendant cet arrêt, ne put retenir un mouvement de