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ne soit très vif ; mais il ne l’est pas assez pour empêcher cet exode torrentiel des Bretons et des Bretonnes vers les grandes villes… Ces émigrants, pour la plupart, disent adieu pour toujours à leur pays, à leur costume, à leurs mœurs et à leurs croyances. Et ce déplacement d’hommes, amené par la surpopulation, n’est point du tout la manifestation d’un instinct d’aventures et de longues randonnées. Car, à de rares exceptions près, c’est en France que le Breton émigre[1]. Et le marin, l’homme de la côte, est particulièrement casanier…

« Tous les faits qui précèdent, et que je vous présente en raccourci, résultent de patientes enquêtes poursuivies sur place. Ils sont vérifiés. Ils ne laissent presque rien subsister du type littéraire breton.

« Comment donc ce type s’est-il établi au point de s’imposer à de grands esprits et à de brillants talents ? Il faudrait un volume pour le dire. Peut-être la suggestion infiniment prenante de cette terre de brumes, de roches rongées, aux formes bizarres, de landes monotones et mélancoliques, de rivières gonflées par la marée et changées en vasières à mer basse, — peut-être cette suggestion a-t-elle entraîné nombre d’écrivains à concevoir un type humain breton en rapport avec la mélancolie et la grisaille de la terre bretonne[2]. »

FIN
  1. Parce qu’on ne lui fournissait pas jusqu’ici les moyens d’émigrer ailleurs. L’émigration actuelle vers le Canada témoigne que le Breton ne craint pas de s’expatrier.
  2. Où serait le mal, même si c’était là une conception a priori, et la Bretagne serait-elle le premier pays où le sol eût façonné à la longue l’habitant ? Le phénomène du mimétisme ne s’observe pas seulement chez les plantes et les animaux. Mais, en fait, toute l’histoire de ce peuple, sa littérature, ses mœurs, son tour d’esprit témoignent en Bretagne du complet accord entre la terre et l’homme