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à des tours, et son abdomen s’enflait pareillement en forme de dôme.

— Mon Dieu ! Madame la Principale, qu’est-ce que vous avez ? demanda Hortense avec inquiétude. Est-ce que vous n’aimez point la bernache ?

— Tiens ! dit M. Lefur, Ce n’est pas une oie ?

— Si fait, Monsieur le Principal ; expliqua doctoralement Prosper, mais une oie sauvage… ancer cinereus

— Je n’aurais pas cru que les oies sauvages atteignissent cette dimension, dit M. Lefur. Madame Lefur fit un effort.

— Il est vrai, dit elle, qu’on ne peut rêver une plus belle bête. Elle pèse au moins dix livres, n’est-ce pas. Madame Prosper ?

— Onze, Madame la Principale, dit avec orgueil Hortense.

— Juste le poids de mon jars ! murmura Madame Lefur.

Et elle soupira en regardant de nouveau la bête déjà aux mains de Prosper, lequel, d’une lame experte, en détachait les aiguillettes, les cuisses et les ailes qu’il portait et rangeait symétriquement à côté de lui sur un second plat… Et, à chaque membre qui prenait le chemin du plat. Madame Lefur éprouvait comme un petit pincement au cœur. De l’énorme volatile, il ne resta bientôt plus que la carcasse, morceau inférieur, généralement abandonné à la domesticité. Mais Madame Lefur n’avait point les préjugés du commun sur la partie de cette carcasse que certains